
Monter un projet alimentaire territorial (PAT) sur deux collectivités en accord avec les réalités agricoles des deux territoires. De quels éléments partir et comment tisser une coopération solide pour le système alimentaire que partagent les territoires ? Voici des éléments d’explication à travers un exemple dans les Deux-Sèvres …
Cet atelier de co-développement a eu lieu au printemps 2019 lors des rencontres “Conduite d’un projet alimentaire territorial” du réseau des démarches alimentaires territoriales.
Retrouvez aussi la fiche pdf en ligne.
Témoins Communauté d’Agglomération du Niortais et Communauté de communes du Haut-Val-De-Sèvre
Consultants Une dizaine de participants d’horizons divers
Région N-A pôle Economie Sociale et Solidaire (ESS), Val-de-Garonne Agglomération (VGA), e-Graine Nouvelle-Aquitaine, Terres en Ville, Université Poitiers, Mellois en Poitou, Yassir Yebba, Pays de Thouars-Loudun, PQN-A, Direction Régionale de l’Alimentation, de l’Agriculture et de la Forêt Nouvelle-Aquitaine (DRAAF N-A).
Contexte
Deux Etablissements Publics de Coopération Intercommunale (EPCI) en situation limitrophe dans le département des Deux-Sèvres mènent, chacun à son rythme, une réflexion sur la mise en œuvre d’un projet alimentaire de territoire. Ces 2 EPCI sont à des stades d’avancement différents.
Du côté de la Communauté d’Agglomération de Niort (CAN)
La CAN (120 000 hbts) a réalisé un diagnostic dans le passé avec l’entrée urbanisme (Schémas de Cohérence Territoriale – SCOT et Plan Local d’Urbanisme – PLU). La forte prégnance de l’agriculture sur le territoire (plus de 70% de la Surface Agricole Utile) explique notamment la volonté de la direction du développement économique de recruter une personne sur l’agriculture. Cette personne a 2 missions essentielles : le maintien de l’élevage sur le territoire et la montée en gamme des productions agricoles du territoire.
Du côté de la Communauté de communes (CDC) Haut Val de Sèvre (HVDS)
Pour sa part, la CDC HVDS a établi un état des lieux de la typologie agricole d’occupation des sols. Il souligne ainsi certains points de vigilance comme la transmission des exploitations. Les deux EPCI s’interrogent donc sur des modalités de coopérations susceptibles de garantir la réussite d’un projet alimentaire de territoire commun. Ce questionnement est très lié au voisinage, aux synergies comparables et aux recommandations de la Préfecture et de la Région, dans le cadre de la contractualisation en cours.
Pour la CDC HVDS (30 000 habitants), le tissu économique local est fortement porté par les industries agroalimentaires. Un important abattoir porcin, la plus grande usine de fabrication de fromages de chèvre du monde et des plates-formes logistiques de distribution sont en effet présents. De plus, le plan climat air énergie territorial (PCAET) est engagé pour atténuer la vulnérabilité du territoire aux aléas climatiques. Il prévoit notamment de travailler sur l’offre et susciter la demande en faisant la promotion des circuits courts.
Ce que ces EPCI ont en commun pour monter un PAT
L’approvisionnement en restauration collective est une préoccupation partagée. Ainsi, un groupement de commandes en développement et une collaboration avec les filières de l’industrie agroalimentaire ont été lancés. Sur ces 2 territoires, la demande citoyenne est en effet claire. Exprimée lors des différentes concertations (SCoT ou PCAET), elle confirme des attentes en matière de circuits alimentaires locaux.
En matière de dynamique territoriale, les 2 EPCI sont inclus dans le pôle de coopération métropolitain Centre Atlantique (9 EPCI, de Fontenay le Comte à La Rochelle). Ce dernier n’a pas mis à l’ordre du jour la dimension agricole ou agroalimentaire. Sur le département des Deux-Sèvres, la Chambre Départementale d’Agriculture (CDA) a souhaité mettre en œuvre un projet alimentaire de territoire. Son objectif est de privilégier les débouchés et la valorisation des produits agricoles. Enfin, la CAN a déposé un dossier de candidature au titre du Programme National pour l’Alimentation (PNA) en 2018. Celui-ci a été retenu à l’échelon régional mais pas au plan national.
Le comité de pilotage du PAT associe notamment:
- la CDA et la Chambre des métiers et de l’artisanat,
- la Direction départementale des territoires 79,
- le Conseil régional et le Conseil départemental,
- l’Ademe,
- l’Agence de l’eau
Ce qu’il faut retenir de cette coopération entre ces deux EPCI
Solutions et idées issues des témoignages et échanges
- « Se demander ce que l’on veut faire ensemble » avant de commencer à répondre à ce qu’est un projet alimentaire de territoire
- Considérer le diagnostic comme un objet de collaboration, voire de coopération
- Adopter la stratégie des « petits pas », « en prenant les différentes problématiques une à une, en définissant des objectifs à travers une filière donnée par exemple ».
- Pour s’apprivoiser, travailler sur de l’échange d’expérience entre les deux EPCI peut être une première étape.
- En matière de gouvernance, proposer un partenariat élargi du comité de pilotage. Cela notamment des représentants des territoires, des agriculteurs, des consommateurs. A ce titre, les conseils de développement associant acteurs publics et privés constituent des illustrations intéressantes de gouvernance élargie.
- Associer les citoyens et habitants dans la démarche «Le mangeur doit être coproducteur du système alimentaire. Il ne faut pas susciter la demande, il faut l’accompagner. »
- (Re) créer du lien social et un lien au territoire qui ne se limite pas à la consommation (éducation, fermes pédagogiques, etc.)
Points de vigilance
- Dans le diagnostic, prendre en compte les contraintes liées au foncier, faire le lien entre documents d’urbanisme et démarche PAT
- Travail important sur l’axe de la sensibilisation : éducation à la pensée complexe, au sein de laquelle l’alimentation a toute sa place.
- Bien repérer l’expression des élus, « quelles sont les priorités en termes d’agriculture ? » pour en faire des leviers efficaces
- Prendre conscience de la temporalité et de la légitimité des actions lancées et de leur gouvernance : accepter que chaque EPCI avance à son rythme.
- Au moment de la mise en œuvre d’un PAT commun, il convient de bien répartir les rôles (chef de file) entre les EPCI.
- Veiller à disposer d’une ingénierie pour garantir l’animation de la démarche de PAT « Pour que ça vive, il faut un portage technique par une personne dédiée. »
- « le saut dans le vide », le fait d’accepter, le fait de ne pas maîtriser ce qui va se passer
Retours d’expériences
- Mellois(79) : problématique comparable, avec une coopération LEADER sur les circuits alimentaires de proximité (structurer l’offre, foncier, mise en œuvre et développement d’un PAT), avec un territoire en Vendée. Un vrai effet d’entrainement !
- Val de Garonne Agglomération (47). Contractualisation avec Bx Métropole (CCGAD), dont le protocole de coopération intègre notamment de la coopération alimentaire
- Loudun (86), coopération avec Thouars, dans le cadre de la contractualisation avec la Région. Une étude sur les circuits courts pour initier la démarche.
- Dijon Métropole (21), une méthode de diagnostic adossée à la consommation. Il est lauréat d’un AAP TIGA (Caisse des Dépôts) qui lui impose de contractualiser avec les territoires alentours.
- Toulouse Métropole a engagé un contrat de réciprocité avec le Pôle d’équilibre territorial rural des Portes de Gascogne (32). Ils travaillent sur la production maraichère et la formation sur réponse aux marchés publics
- Communauté d’agglomération de Châtellerault. Différentes initiatives qui intègrent les citoyens, comme le Défi familles à alimentation positive, MonRestauResponsable, avec un portage par le CPIE (centre permanent d’initiative pour l’environnement).
Retrouvez les autres comptes rendus d’ateliers de la rencontre “Conduite d’un projet alimentaire territorial” sur la page dédiée mais aussi toutes nos ressources méthodologiques sur les projets et démarches alimentaires territoriaux.
A lire aussi sur ce thème