Limoges Métropole entame sa transition hydrique
En 2022, la collectivité a commencé à déployer un plan d’actions ciblant les acteurs économiques et les différents usages de l’eau. Son objectif est d’assurer une quantité et une qualité d’eau suffisante pour les besoins présents et à venir.
“En matière d’eau il faut être agressif et agir vite, sinon les conséquences seront de plus en plus lourdes et de plus en plus dramatiques”
Philippe Janicot, vice-président de Limoges Métropole en charge du cycle de l’eau
Problème/ besoin initial
Un écosystème local autour de l’eau
Avec la gestion des déchets, la transition hydrique est l’autre pilier du projet de territoire de Limoges Métropole. Cette ressource est en effet centrale dans son histoire. Outre la qualité et les quantités disponibles, le territoire bénéficie d’un écosystème et d’une expertise locale. L’Office international de l’eau (OiEau) y est installé depuis 1991 et abrite le Centre national de formation aux métiers de l’eau. L’Université de Limoges propose un cursus sur l’eau depuis les années 70, et l’offre de formation initiale s’étend aujourd’hui du bac pro au master. L’école d’ingénieurs Ensil-Ensci offre elle aussi une spécialité “Eau et environnement”. Enfin, Limoges accueille le laboratoire E2Lim, unité de recherche de l’Université de Limoges qui regroupe les compétences en pointe dans le domaine de l’eau et de l’environnement.
“Nous avons voulu mettre en avant ces atouts tout en se préparant aux conséquences du changement climatique, explique Philippe Janicot, vice-président de Limoges Métropole en charge de l’eau. L’objectif est d’assurer la sérénité des entreprises et de la population vis-à-vis de la gestion de l’eau.” Avec son programme de transition hydrique, la métropole espère créer une véritable filière autour de l’eau, et en faire un levier d’attractivité, au même titre que la céramique. “Cela peut attirer de nouveaux habitants et de nouvelles entreprises”, estime l’élu.
En 2021, un diagnostic a donc été réalisé et a débouché sur un plan d’actions prenant en compte le changement climatique et les menaces qui pèsent sur l’eau, tout en garantissant une gestion partagée entre les différents usagers, notamment les entreprises. Ce qui explique que la direction Innovation tourisme et transitions (au sein du pôle économie) co-pilote le programme aux côtés de la direction du cycle de l’eau. Le plan d’actions intervient sur la gestion de l’eau potable, l’assainissement et la protection des milieux aquatiques. Il poursuit quatre objectifs :
- Disposer d’une qualité et d’une quantité d’eau suffisante pour tous les usages
- Optimiser la gestion de l’eau des entreprises
- Soutenir le développement de la filière eau
- Communiquer sur l’image d’un territoire résilient, innovant et exemplaire dans la gestion de l’eau
Solutions apportées
Gestion intégrée des eaux pluviales
La collectivité a déjà lancé certaines actions comme la gestion intégrée des eaux pluviales. Dans quatre communes, de nouveaux lotissements ont été aménagés de manière à ce que l’eau s’infiltre naturellement dans les sols, même en cas de fortes précipitations et après une période de sécheresse. La désimperméabilisation des sols est dorénavant prise en compte dans les projets de réaménagement urbain.
L’accompagnement des entreprises
Ce dispositif lancé en 2023, en collaboration avec le centre technique de l’eau de Limoges, comprend trois volets. Le premier consiste à sensibiliser les chefs d’entreprise. Le deuxième à proposer aux entreprises dont l’activité nécessite d’utiliser de l’eau (agro-alimentaire, industrie, chimie, artisanat, hôtellerie- restauration,…) de réfléchir à une optimisation, via un pré-diagnostic. Et le troisième à proposer un dispositif d’aides aux entreprises qui souhaiteraient recourir à des prestataires de conseil avant de réaliser des investissements.
Expérimentations avec l’Université de Limoges, le CteLim et différents partenaires
Plusieurs expérimentations vont être menées avec l’Université de Limoges. L’une d’entre elles s’adresse aux installations de moins de 3000 EH (équivalent habitant) dont les eaux usées présentent des taux de phosphore élevés. Les traitements actuels ne sont pas satisfaisants en termes d’efficacité et de coût. L’objectif est donc de mettre en place de nouveaux procédés économiquement viables. Une autre expérimentation prévue concerne la lutte contre les macro-déchets plastiques rejetés dans le domaine public.
Schéma directeur et PLUI
Pour définir le futur schéma directeur des eaux, des études sont engagées sur la gestion de l’eau potable, l’assainissement des eaux usées et la gestion des eaux pluviales. Croisées avec la politique d’urbanisme, elles permettront d’évaluer les modes de gestion actuels, et d’élaborer une stratégie à l’horizon de vingt ans pour l’optimisation de la performance et la rénovation des équipements.
De son côté, le futur plan local d’urbanisme intercommunal (PLUI) prendra en compte le programme de transition hydrique.
Relations avec les agriculteurs
Limoges Métropole porte un projet de contrat territorial de milieux aquatiques qui s' inscrit dans la volonté d’associer l’ensemble des acteurs. Ce contrat va être signé avec la Chambre d’agriculture de la Haute-Vienne afin d’inciter les agriculteurs à mettre en place des pratiques agricoles qui aident à améliorer l’état des cours d’eau et des zones humides.
Sensibilisation du grand public
La métropole a prévu de mener des opérations de communication sur l’usage de l’eau potable, la détection de fuites d’eau ou encore l’influence de l’utilisation d’eau en bouteille sur la quantité de déchets. Des actions pour améliorer la connaissance des métiers de l’eau et l’orientation des jeunes vers de futures carrières professionnelles dans ce domaine seront favorisées. Dans ce cadre, des événements seront proposés aux jeunes afin de leur faire découvrir les métiers de l’eau et les activités techniques et scientifiques qui s’y rattachent. Des visites de la station d’épuration, en cours de rénovation, seront organisées.
Premiers résultats
- La gestion intégrée des eaux pluviales a été mise en place dans quatre communes. Les lotisseurs ont compris et intégré les enjeux qui se posaient.-- Les expérimentations menées avec l’université sont lancées
Perspectives
- Le budget dédié au renouvellement du réseau d’eau potable - 1 % du réseau renouvelé - a été conforté malgré le contexte économique et budgétaire.
- Limoges Métropole souhaite mettre en place, en partenariat avec les notaires, un contrôle systématique des raccords d’assainissement lors de la vente d’un bien. Usés ou mal réglés, certains raccordements entraînent le rejet d’eaux usées dans le milieu naturel.
- Ce sujet doit se “démocratiser” auprès du grand public. “Les épisodes de sécheresse imposent une prise de conscience, ils montrent que l’eau est en train de devenir un problème, observe Philippe Janicot. Nous devons nous appuyer sur ce contexte pour que chacun utilise mieux cette ressource.”
- Le programme est prévu jusqu’en 2026, fin de la mandature, “mais ce n’est qu'une première étape”, prévient le vice-président.
Facteurs de réussite
- Limoges Métropole constate une réelle adhésion des communes.
- Le programme bénéficie d’un portage politique fort et de l’ancrage technique des services du cycle de l’eau et du développement économique.
- La constitution d’une équipe transversale est un atout.
- Le groupe projet se réunit régulièrement.
- Le programme de transition hydrique est en cohérence avec les actions régionales et nationales. Au niveau régional, la Nouvelle-Aquitaine veut diminuer de 30 % la consommation d’eau. Au niveau national, le Pacte national pour l’eau a fixé des objectifs en matière de réduction des consommations domestiques, industrielles ou agricoles, avec moins 10 % en cinq ans et moins 25 % en quinze ans. Ce contexte pourrait faciliter le financement de certains projets ou expérimentations.
Enseignements
- Le programme va nécessiter du temps pour se déployer.
- Il faut réussir à convaincre et à remporter l’adhésion de multiples acteurs.
- Le travail avec des partenaires nécessite de s’adapter car ils ont des attentes, un calendrier et une manière de fonctionner différents d’une collectivité.
- Pour que le programme prenne toute son ampleur, il est important de le “faire infuser” dans tous les services de la métropole, de les associer le plus largement possible à la démarche.
Partenaires principaux
- Techniques : centre technique de l’eau de Limoges, le cluster Soltena, l’office international de l’eau (Oieau), l’Université de Limoges, l’agence de l’eau Loire-Bretagne
- Financiers : l’agence de l’eau Loire-Bretagne, la Région Nouvelle-Aquitaine, l’Etat
Budget
- Budget global d’animation et de soutien : 1,3 million d’euros
- Actions spécifiques :
- Travaux de modernisation et d’optimisation énergétique de la station d’épuration principale : 26,3 M € HT cofinancé avec l’agence de l’eau Loire-Bretagne
- Démonstrateur traitement eaux usées : 100 000 € HT cofinancé avec l’agence de l’eau Loire-Bretagne et la Région Nouvelle-Aquitaine
Calendrier
- 2021 : diagnostic de la situation hydrique du territoire
- 2022 : lancement des premières actions (expérimentations, gestion intégrée des eaux de pluie)
- 2023 : lancement de l’accompagnement des entreprises
- 2024 : année de la transition hydrique avec plusieurs dates clés (50 ans de la filière eau, 60 ans des agences de l’eau…)
Personnes ressources
Anne Burgalières, cheffe de projet Territoire en transition hydrique - 05 19 39 20 04 - anne.burgalieres@limoges-metropole.fr
Julien Villard, chargé de mission Transition hydrique - 05 55 45 77 23 - julien.villard@limoges-metropole.fr
Crédit photo : Mathieu Fontaine
Date de publication : 25 octobre 2023
Rédigé par Fanny Laison