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“Les crises, une deuxième chance pour le développement local ?” – Retour sur la conférence de Bernard Pecqueur

Equipe PQN-A , Christophe Rochard
Publié le 07/11/2022
Temps de lecture : 4 min
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Qu’entend-on par développement territorial ? Quel est le rôle historique des politiques publiques dans le développement local ? Quel est l’impact des crises sur le développement des territoires ? Les crises sont-elles une deuxième chance pour le développement local  ? Autant de questions qui ont été abordées par Bernard Pecqueur lors de l’ouverture du Forum des développeurs le 15 septembre 2022 à Soyaux.

Bernard Pecqueur est économiste et professeur émérite à l’Université de Grenoble Alpes. Ses recherches portent sur le développement local et territorial et les modalités de la gouvernance territoriale. Il a notamment développé la notion de « ressources territoriales » comme élément de stratégie collective de développement. Retour sur les points clefs de son intervention.

Le territoire, un terme porteur de confusion

Pour Bernard Pecqueur, le terme de “territoire” est ambigu. Il recouvre deux réalités très différentes :

  • d’un côté, le support administratif et ses différentes échelles, commune, intercommunalité, département, région…
  • de l’autre, le processus de développement territorial. Celui-ci désigne les engagements des différents acteurs qui s’organisent entre eux. Ces personnes cherchent ensemble à trouver la vocation du territoire et mettre en place des actions qui vont contribuer à son développement.

Retour “express” sur la décentralisation en France

Bernard Pecqueur est revenu sur l’histoire de la décentralisation et nous livre içi son analyse :

  • Avec la première vague de décentralisation en 1982-1983, les collectivités comprennent qu’elles vont avoir des possibilités beaucoup plus importantes pour agir. Le contrôle de légalité de l’Etat passe alors de l’a priori à l’a posteriori. Ces mesures ont pourtant créé un grand malentendu à l’époque. Les élus locaux ont cru qu’ils avaient la compétence de l’économie et de l’emploi. Ils ont ressenti une grosse pression à une époque où le chômage montait de manière significative dans les années 80.
  • En 2015, la loi Nouvelle Organisation Territoriale de la République (NOTRe) a clarifié le rôle de chacun et débarrassé les EPCI et les communes de ce poids, la compétence du développement économique revenant aux régions.
  • On a assisté au fil des décennies à une dégradation du développement territorial. Différentes lois (Loi d’orientation pour l’aménagement et le développement durable du territoire, Solidarité et renouvellement urbain,…) ont attisé les tensions entre les conseils de développement et les élus. “On a connu une lente disparition de l’aménagement du territoire. L’action centrale de l’Etat s’est étiolée avec l’abandon progressif de la planification”.
  • A partir des années 1980, la mondialisation a rendu difficile les dynamiques de développement avec les délocalisations et des chocs exogènes. Mais dans le même temps, la notion d’économie résidentielle a émergé. Les acteurs ont pris conscience que les revenus pouvaient provenir de l’extérieur “à condition qu’on ait quelque chose à vendre” (travaux de Laurent Davezie). On a alors assisté à une inflexion des politiques publiques vers “le pactole” pour essayer de capter ces revenus.

Quelle stratégie adopter? entre attractivité et spécificité

Bernard Pecqueur distingue 2 types de stratégies qui, dans une certaine mesure, peuvent se combiner entre elles.

  • L’attractivité territoriale a longtemps été présentée comme un levier essentiel pour le développement local, voire une injonction largement encouragée par les politiques publiques. Bernard Pecqueur n’a jamais caché ses réserves à son endroit. Pour l’universitaire, la stratégie d’attractivité est indispensable mais limitée. “Si on est attractif, on pense que le salut vient de l’extérieur du territoire. C’est le contraire de l’endogénéité” s’exclame t-il. “Il n’y a pas d’entreprises cachées prête à arriver sur un territoire !”
  • La stratégie de spécificité est une alternative. Ce choix nécessite un processus de réflexion et de dialogue avec l’ensemble des acteurs (élus, entreprises, associations…). La démarche consiste à trouver des potentiels qui visent à se différencier de ses voisins. Cette stratégie est exigeante mais intéressante car elle nécessite de la coopération entre acteurs et offre des potentiels surprenants. Un des exemples les plus connus est celui des Baronnies dans le sud de la Drôme où les forces vives du territoire ont travaillé sur l’huile d’olives, ont obtenu l’AOC, et ensuite élaboré un “panier de biens” réunissant le paysage, les champs de lavandes, le chant des cigales… Il y a toute une construction sociale qui permet une offre de site globale et qui relie étroitement les acteurs entre eux. ” Chaque territoire doit être un territoire d’exception. Il vaut mieux faire ce que son voisin ne sait pas faire, plutôt que de faire comme lui à moins cher”.

 

Pour l’universitaire, l’important est de penser le territoire de manière la plus transversale possible, de relier les sujets entre eux et d’horizontaliser. C’est la fonction du développeur qui doit articuler et coordonner l’ensemble. On rentre ici dans une logique de cohérence territoriale et dans “une forme d’osmose”. “La cohésion, ça veut dire ne pas penser en silo”.

 

Une succession de crises qui impactent le développement local

Bernard Pecqueur est ensuite revenu sur les crises successives à fort impact sur les territoires:

  • la crise financière et économique de 2008 ; elle a entraîné avec des séquelles lourdes sur le plan économique et social,
  • la crise climatique ; elle nous montre que les clefs habituelles du développement ne fonctionnent plus. Bernard Pecqueur invite à “se hâter lentement” et à prendre le virage des transitions. Le développement territorial intègre une façon différente de penser les ressources. C’est pourquoi il peut contribuer à relever le défi climatique.
  • la crise sanitaire ; parmi ses nombreuses conséquences, on peut citer le fait qu’un million de bénévoles “sont sortis du système” entraînant une forte baisse de la socialisation et que la place du travail est requestionnée avec une profonde remise en cause du système.
  • la crise énergétique ; la guerre en Ukraine met en exergue la dépendance de plusieurs pays pour l’énergie. Les déplacements sont rendus plus difficiles avec l’envolée des prix du carburant. “L’enjeu de la mobilité revient sur le haut de la pile des préoccupations”.

À la source du développement territorial, il y a un problème… qui trouve une solution

Pour Bernard Pecqueur, le développement territorial est une machine à résoudre des problèmes. Il convient dans un premier temps d’identifier ces problématiques et de les partager entre acteurs locaux. C’est l’identification des problèmes qui réunit les acteurs et qui crée un sentiment d’appartenance au territoire. On tente ensuite de les résoudre par l’approche territoriale. Bernard Pecqueur conclut avec une pointe d’optimisme : “Avec le développement territorial, il n’y a pas de territoires foutus”.

(Re)visionnez la vidéo-replay de Bernard Pecqueur

 

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Christophe Rochard, chargé de mission Emploi

E-mail : christophe.rochard@pqn-a.fr

Tél : 06 31 21 77 44

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