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Parole d'acteur #22 : Yves Stervinou, Associé de Magasin U

Publié le 26/11/2024
Temps de lecture : 10 min
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Yves Stervinou est le propriétaire du magasin U de Meschers-sur-Gironde, en Charente-Maritime. Ses racines et son parcours dans les domaines de l’agriculture, de l’alimentation et de la distribution lui confèrent une vision riche du développement territorial, qu’il met en œuvre au quotidien. 

PQN-A : Pouvez-vous vous présenter ?

Yves Stervinou : J’ai 59 ans, et suis le fils d’un agriculteur et d’une agricultrice en polyculture-élevage en Bretagne. Après un brevet de  technicien agricole option polyculture élevage,  j’ai travaillé pendant huit  ans dans la filière agricole, en exerçant dans l’accompagnement à la production, dans la transformation et dans des abattoirs. J’ai acheté et vendu des bovins, cochons, aliments. Je suis finalement arrivé dans la grande distribution en 1993. J’ai le profil de celui qui a poussé le caddie pour devenir directeur. Je dirige le magasin U de  Meschers-sur-Gironde depuis 2009. 

Comment décririez-vous votre territoire ?

Je travaille et vis sur la Côte de Beauté, c’est un territoire qui vit au gré des saisons. En hiver, on a une relation privilégiée avec les producteurs, on vit entre nous, et en été, nous distributeurs, avons le rôle de vitrine du savoir-faire local, auprès des touristes ! Ici nos agriculteurs et artisans produisent du pineau, cognac, de la charcuterie, de la pâtisserie et boulangerie, il y a aussi un peu de polyculture élevage.

Qu’est-ce que le développement territorial selon vous ?

C’est la création par l’ensemble des acteurs d’un territoire d’un cercle vertueux de valeur ajoutée, grâce à la relocalisation de tous les maillons des filières économiques. Par exemple, favoriser les circuits courts de proximité permet de faire travailler tout un territoire et de répondre à des enjeux économiques locaux ainsi qu'à des préoccupations globales telles que la réduction des émissions de gaz à effets de serre.

Quel rôle jouez-vous dans ce développement ?

En tant que dirigeant de commerce alimentaire, je joue le rôle de trait d’union entre deux mondes. Je suis le porte-parole des agriculteurs auprès des consommateurs, en expliquant pourquoi il est intéressant d’acheter local. Inversement, je montre aux producteurs comment valoriser leurs produits pour bien les vendre. 

Concrètement, qu’est-ce que cela implique d’être ce “ trait d’union ” ?

C’est plus facile quand on habite sur le territoire ! Les producteurs, je les rencontre aux sorties d’écoles, dans les associations, aux événements locaux, et on parle. Moi et mes collègues U, Leclerc, Intermarché, on est des PME au même titre que les agriculteurs. À Meschers, il y a 3300 habitants, les gens me connaissent comme Yves, président du club de foot ! C’est une histoire de sensibilité, on est dans notre territoire, donc on a tous à cœur qu’il se développe : le local c’est autant l’épanouissement des enfants que la valorisation de notre agriculture. Bien sûr, je me rends aussi dans les fermes pour apprendre à mieux se connaître, afin de bien travailler ensemble et valoriser les savoir-faire de chacun : la production et la vente. 

 

Quant aux consommateurs, on leur fait rencontrer les producteurs qui viennent présenter leurs produits au magasin, on communique sur les produits locaux dans les rayons, sur les réseaux sociaux. On essaie évidemment de proposer un prix qui convienne au producteur et au consommateur, avec une approche pédagogique.

 

Dans le magasin, sur 18 000 articles, 10% sont des produits locaux et représentent 10% du chiffre d’affaires. C’est un bon taux ! C’est possible car c’est un magasin indépendant, on achète certains produits via des marques nationales et marques d’enseigne par la coopérative  Système U. Sur les autres produits on est par contre libres de choisir l’approvisionnement.


 

De quoi êtes vous fier ?

De la relation humaine avec mes collaborateurs, et d’avoir contribué à travailler les produits locaux dans l’enseigne U, en valorisant l’économie locale grâce à la relocalisation.

Avez-vous des regrets ?

Ne pas être agriculteur ! Mais je contribue au monde agricole à ma façon.

Quel message aimeriez-vous porter ?

Impliquez-vous sur votre territoire ! Ne restons pas spectateur de la vie locale, quand on s’implique c’est qu’on y croit ! Ne pas agir, c’est subir, et cela conduit au pessimisme. Tout le monde a envie de consommer français : cela n’a aucun sens de produire parmi les meilleurs produits du monde et de les exporter. Pour cela il faut que chacun s’implique, pour redonner goût à la vie locale et enrayer le déclin des petites villes.  

 

Comment envisagez-vous l’avenir ?

Je crois que la distribution devrait accompagner les jeunes agriculteurs à s’installer, via le système de parrainage. Je crois beaucoup à la coopération de tous les acteurs dans les Projet Alimentaire de Territoire (PAT). Système U est présent dans 200 PAT en France. Il est essentiel que tous les acteurs de la distribution y participent ! En effet, nous avons l’expertise sur la connaissance des comportements d’achats sur les zones de chalandise, nous pouvons offrir un point de retrait centralisé des marchandises, mettre en place des accords tripartites avec des producteurs et d’autres acheteurs pour la commercialisation par exemple d’une carcasse entière. Nous pouvons également livrer y compris pour de petites quantités -on le fait pour les steaks- à la restauration collective publique, être l’intermédiaire auprès du réseau local pour écouler la production en local, etc…

 

Je pense toutefois que pour relever les ambitions, il faudrait qu’il y ait plus d’élus qui viennent du monde de la distribution et du monde agricole. Je suis arrivé à une étape de la vie où je me pose la question de me présenter aux municipales dans deux ans. Quand vous voulez que ça bouge, il faut s’engager en politique, c’est ce que j’ai compris à travers mon parcours.

Quelle est votre vision de PQN-A ?

PQN-A permet de se rencontrer et d’échanger plus qu’on ne peut le faire aujourd’hui, d’avoir une proximité avec le monde politique au niveau régional. PQN-A pourrait être le médiateur pour faire se rencontrer les acteurs locaux dans divers projets de développement, au-delà des PAT.

 

Yves Stervinou est intervenu en novembre 2023 lors du Forum des acteurs du Pacte alimentaire Nouvelle-Aquitaine. Retrouvez la synthèse p.42-43. 

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