L'Eveil : "aller vers", insertion et coopération au service de la cohésion sociale et d'une alimentation saine et durable pour tous
Carte d'identité
Sous thématique :
Cohésion sociale, Insertion, Filières et circuits de proximité
Démarche associée:
Projet alimentaire de territoire Grand Poitiers - Haut Poitou - Vallées du Clain
Statut juridique :
Association portant plusieurs ateliers d'Insertion par l'Activité Economique (IAE)
Aire d'influence : Périmètre du PAT
Date de lancement :
1984
État d'achèvement :
En cours
Coût du projet :
Budget global d'1,4 millions d'euros
La démarche en bref
Initiée en 1984 par des habitants du quartiers des Couronneries à Poitiers, l'association l'Eveil n'a eu de cesse d'aller vers les habitants pour répondre à leurs besoins et favoriser la cohésion sociale. Elle gère aujourd'hui notamment un restaurant, une épicerie solidaire et une activité de maraîchage biologique, qui permettent l'insertion des personnes éloignées de l'emploi, tout en contribuant à rendre accessible une alimentation saine et durable.
Contact
Association l'Eveil
10 rue du Fief des Hausses
86000 POITIERS
tél. 05 49 45 91 58
Mail : accueil@l-eveil.fr
Acteurs
Public cible :
Habitant.es du quartier des Couronneries de Poitiers / Personnes éloignées de l'emploi/ Client.e.s des épiceries sociales et solidaires du territoire du PAT / Epiceries sociales et solidaires du territoire / Professionnels de l’agriculture ou l'agroalimentaire et acteurs du PAT / Élus locaux
Partenaires techniques :
L'EBE Papiole, l'association Capée, Grand Poitiers, le centre social et culturel la Maison du Projet, INAE
Partenaire financier :
Grand Poitiers, DREETS Nouvelle-Aquitaine, DDETS 86, Département de la Vienne, la CAF, la Région, la Ville de Poitiers, l'Etat dans le cadre de la Politique de la ville
Contexte
Association loi 1901, l'Éveil naît en 1984 grâce à un groupe d’habitants du quartier des Couronneries (Poitiers, quartier en périmètre de Politique de la ville). Elle a pour mission de créer une dynamique de quartier pour tisser des liens sociaux contre toute forme d’exclusion, de mettre en place des services ou loisirs accessibles à tous, de promouvoir l’insertion des plus démunis et soutenir les intérêts des familles du quartier. Au-delà des services de loisir et du quotidien proposés dans le cadre de l’Espace de Vie Sociale qu’elle gère, l’Eveil porte trois activités en atelier d’insertion par l’activité économique : un restaurant, du maraîchage bio, et une épicerie solidaire implantée dans le quartier. La structure compte 11 permanents, 32 salariés en parcours d’insertion, 80 bénévoles, 1680 adhérents, et a un budget global d’1,4 millions d’euros.
C'est dans le cadre du PAT que l'Eveil porte le projet de production de légumes qui seront destinés à la vente dans les épiceries sociales et solidaires du territoire.
Pour en savoir plus sur le fonctionnement des Jardins de l'Eveil, téléchargez la fiche ci-dessous, réalisée par Bio Nouvelle-Aquitaine.
Objectifs
- Créer de la cohésion entre les familles du quartier des Couronneries
- Lutter contre l'exclusion sociale et économique
- Permettre un accès à une alimentation saine et choisie
La mise en œuvre des actions
En 1993, l'Eveil créée une nouvelle activité d'insertion par l'activité économique : le maraîchage biologique, initialement dans un quartier de Poitiers. En 2014, des acteurs locaux de l’agriculture rassemblés autour d’InPACT, en lien avec une élue, ont voulu conduire un projet agricole en maraîchage sur un terrain de 40 hectares à Migné Auxances, propriété de la ville de Poitiers depuis quarante ans. Ce projet collectif a permis d'installer deux maraîchèr.e.s, un GAEC en Plantes Aromatiques et Médicinales sur 15 ha et de déménager sur 4,5 ha les Jardins de l’éveil qui étaient initialement situés dans un quartier de Poitiers. Sur le site, on produit bio, et on met en commun les moyens de production : mise en place d’une réserve d’eau (600m2), réflexion de réouverture de l’espace test agricole dans la continuité du travail d’insertion de l’Éveil. 14 salariés en CDDI 24 mois maximum y travaillent chacun de 24h par semaine, aux côtés de 3 encadrants et d’Assistants Socio-Professionnels.
Résultats
Le Grand Poitiers travaille de près avec les Jardins de l'Éveil et de l’APPUI pour approvisionner les épiceries du territoire en légumes bio et frais. Dans le cadre de cette convention avec le Grand Poitiers et Papiole, l'Eveil doit produire 8,4 tonnes de légumes, et les Jardins de l'APPUI 1,9 tonnes, soit 10,3 tonnes au total.
Les circuits de vente des Jardins de l'Eveil sont pour 70% des magasins spécialisés comme Biocoop, mais aussi Leclerc. L'autre partie de la production est de la vente sociale : dans l’épicerie, aux marchés et restaurant de l’Eveil, et à la marge aux particuliers. L’Eveil compte 65% de “sorties positives” pour ses salarié.e.s en parcours, c’est-à-dire trouver un emploi, une formation, ou projet durable. Sur l’Atelier Chantier d'Insertion (ACI) des Jardins, une part significative des sorties se font vers le maraîchage ou une activité en lien avec la nature. “C’est un retour aux sources pour les personnes, car toute société naît de l’action alimentaire” résume Patrice Jouneau, le directeur.
L’Eveil sert 11 000 repas équilibrés et frais par an (environ 80 par jour) avec un tarif préférentiel ouvert aux adhérents de 3,90€, propose des marchés solidaires de produits bio à tarif préférentiel issus de ses jardins en insertion. Mais il ne s’agit pas que de fournir une alimentation saine. “Les personnes sont désireuses de découvrir de nouveaux produits, et surtout, d’apprendre à cuisiner.”, témoigne le directeur.
L’aller-vers, ça fonctionne, car on écoute, on observe, et on répond mieux au besoin des gens avec eux !
Facteurs de réussite
- L'histoire longue de l'Eveil qui lui confère reconnaissance et capacité de travailler avec les acteurs du territoire
- Les producteurs (Eveil et l'APPUI) déterminent le coût de revient des légumes choisis avec le Grand Poitiers, pour trouver la marge qui permet de vendre les légumes à 50 centimes du kilo/pièce aux clients des épiceries, tout en rémunérant les producteurs au prix coûtant.
- La marge multipliée par la quantité de légumes détermine le montant de la subvention du Grand Poitiers aux ACI.
- Un suivi entre le Grand Poitiers et les jardins est effectué pour planifier les cultures concernées, pour voir comment est consommée la subvention, les légumes qui ont du succès etc
- La mobilisation des élus au PAT et au développement économique et leur proximité avec les entreprises et acteurs associatifs du territoire
- Un financement des CDDI (Contrat à Durée Déterminée d'Insertion) par l'Etat et le Département
Freins
- Un modèle économique qui devra trouver un nouvel équilibre, car il repose aujourd"hui beaucoup sur le financement du Grand Poitiers de l'appel à projet Mieux Manger Pour Tous de la DREETS pour financer le différentiel de prix entre celui payé aux Jardins de l'Eveil, et celui payé par les clients des épiceries
Les salarié.e.s en parcours d'insertion analysent les planches de maraîchage sur le terrain à Migné-Auxances.
© Association l'Eveil
Les salarié.e.s en parcours d'insertion s'occupent du conditionnement des légumes à Migné-Auxances.
© Association l'Eveil
Les salarié.e.s en parcours d'insertion tiennent le marché dans le quartier des Couronneries.
© Association l'Eveil
Enseignements
Pourquoi le Grand Poitiers intervient-il en soutien de l’activité d’un acteur privé ? Il faut regarder de plus près le modèle économique d’un Atelier Chantier d’Insertion (ACI). Certes, les Jardins de l'Éveil ont une activité économique importante, mais Philippe Paradot le rappelle “nous n’avons pas les mêmes rendements qu’une activité conventionnelle”. Les salarié.e.s sont en effet en contrat d’insertion, ils ne sont donc pas des agriculteur.ices professionnel.les et les coûts d’accompagnement sont importants, avec la mobilisation des Accompagnatrices Socio-Professionnelles. Les ACI sont donc soutenus par l’Etat qui finance à 70% les CDDI, et par le département car les salarié.e.s sont aussi au RSA. Le reste du financement de l’activité et des salaires est lié à l’activité économique, car en tant qu’exploitant agricole, l’association a besoin d’investir régulièrement pour renouveler le matériel, et a donc besoin de se dégager de la marge et de la trésorerie. Le Grand Poitiers intervient donc en soutien d’un acteur économique qui a des contraintes particulières liées à sa mission de projet social contre l’exclusion, qui contribue au développement de nouveaux circuits économiques solidaires sur son territoire, en créant de l’emploi.
Bernard Guilloteau, président de l’Eveil, résume ainsi la coopération entre les structures : “Nous avons besoin de l’appui des pouvoirs publics. Ensemble, on se retrouve tous à agir en en faveur d’une politique alimentaire territoriale durable”.
Perspectives
L’Eveil a de belles perspectives pour démultiplier son impact. Ainsi, le restaurant solidaire déménagera pour rejoindre le projet phare du renouvellement urbain du Grand Poitiers, le Pôle d'animation culturel des Couronneries, en 2028. Cela lui permettra une meilleure visibilité au sein du quartier des Couronneries, dans un espace agrandi, au service d’une plus grande mixité sociale et intergénérationnelle. Au-delà de la cohésion sociale, l’enjeu est aussi de pouvoir accueillir dignement plus de convives, et d’équilibrer les recettes du restaurant, dont la clientèle est aujourd’hui à 95% bénéficiaire du tarif préférentiel.
Le développement de l'activité de Papiole et la pérennisation du modèle économique d'approvisionnement en légumes frais, locaux et bio permettra d'une part le développement de l'activité des jardins, de l'insertion sociale et économique que cette activité permet, et un renforcement de l'accès à une alimentation saine pour les clients des épiceries et du restaurant.
Par ailleurs, l’association va travailler avec la Maison des Projets (centre social et culturel) pour proposer des ateliers de sensibilisation et de cuisine. L’objectif ? Une réappropriation de l’envie et de la capacité de cuisiner. Pour engager davantage les personnes bénéficiaires dans la décision et l’action, le Capée prévoit une enquête auprès des bénéficiaires des épiceries sur le catalogue de produits proposés, et coordonne des visites de fermes et cueillettes. “Cela donne des échanges incroyables. Dans une logique solidaire, la cueillette doit servir pour eux, mais aussi si possible au reste de l’épicerie” souligne Jean-Marie Caillère.
La salle du restaurant solidaire aux Couronneries, géré par l'Eveil, est fin prête à recevoir les convives pour le repas spécial "Octobre rose".
© Association l'Eveil
Cette fiche expérience a été réalisée suite à la rencontre "L'ESS et les PAT, une opportunité pour la relocalisation de systèmes alimentaires durables", qui a eu lieu le 1er octobre 2024 sur le territoire du Grand Poitiers. Lors de cette journée organisée par PQN-A en coopération avec le Grand Poitiers, Capée, Papiole, l'Eveil, la CRESS Nouvelle-Aquitaine, les participants ont notamment pu visiter l'entrepôt logistique de Papiole, et écouter les témoignages des représentants de Capée, Papiole et l'Eveil.