Retour sur le webinaire “Numérique responsable et collectivités locales : de quoi parle-t-on ?

Ce webinaire a réuni près de 50 participants autour de trois intervenants de Nouvelle-Aquitaine :

- Fabien ZACCARI, directeur des systèmes d’information de la communauté de communes de Maremne Adour (MACS), dans les Landes.

- Jean-Paul CHIRON, chargé de mission Innovation numérique responsable / Logiciels libres au sein de la Délégation numérique de la Région Nouvelle-Aquitaine. Trésorier de l’association nationale ADULLACT

- Vincent COURBOULAY, enseignant-chercheur à l’université de La Rochelle. Cofondateur de l’Institut du numérique responsable (I.N.R), basé à La Rochelle, auteur de deux livres parus aux Éditions Actes Sud

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Les collectivités locales de Nouvelle-Aquitaine et leurs 180 000 agents territoriaux sont non seulement des utilisatrices, mais aussi des productrices de services numériques.. En France, quatre personnes sur 10 se déclarent pas ou peu à l’aise face à la réalisation d’une démarche en ligne. Le numérique, à travers ses usages et les matériels nécessaires à son fonctionnement au niveau mondial, émet autant de Co2 que l’aviation civile. 

La Loi du 15 novembre 2021 vise à réduire l'empreinte environnementale du numérique en France (dite Loi REEN). Cette loi rend obligatoire l’écriture d’une stratégie numérique pour les communes ou EPCI de plus de 50 000 habitants et ce à partir du 1er janvier 2025.

Enjeux sociaux, enjeux environnementaux… qu’est-ce que serait un numérique responsable et inclusif ?

Pour tenter de répondre à cette question, Pays et Quartiers de Nouvelle-Aquitaine a proposé un webinaire visant à définir la notion de numérique responsable, de comprendre le cadre régional dans lequel peuvent s’inscrire des stratégies locales de numérique responsable et d’illustrer cette notion par des exemples concrets.

Selon Vincent Courboulay, le numérique responsable peut être présenté comme “l’outil de réconciliation entre les urgences climatiques et sociales et la transition numérique”. 

C’est un objectif avec deux composantes:

1. l'amélioration de l'empreinte économique, sociale et environnementale du numérique (Green for IT)
2. l’utilisation du numérique pour améliorer l'empreinte économique, sociale et environnementale d'autres procédés (IT for green).

La notion a évolué depuis son apparition au début de l'année 2000 ; elle s’est structurée à partir des années 2010 grâce aux contributions d’associations et d'organisations telles que l’INR et à son appropriation par des territoires comme la Nouvelle-Aquitaine.

La notion de numérique responsable est “polymorphe” et continue d’évoluer, en intégrant les évolutions technologiques qui sont permanentes, pour faire face à de nouvelles problématiques posées par l’IA, la  blockchain ou la crypto-monnaie.

Les enjeux pour les collectivités en matière de numérique responsable sont multiples mais représentent aussi des opportunités. Exemples : 

Les enjeux posés par le numérique responsable peuvent être regroupés au sein de la matrice des 4 P :

• Planet (enjeux environnementaux)
• People (enjeux sociaux)
• Prosperity (enjeux économique)
• Protect (enjeux de sécurité)

Face aux défis multiples, interconnectés et mondiaux, il revient à chaque collectivité locale de décider collectivement d'agir à son échelle, à travers une trajectoire et dans un temps long. Il s’agit d’entrer dans un processus d'amélioration continue en tenant compte des spécificités de chaque territoire.

Les étapes à suivre peuvent être les suivantes : 

1. De l’humilité, 
2. Un premier pas, 
3. Des décisions justifiées et justifiables qui s'inscrivent dans un récit territorial, 
4. Un processus d'amélioration continue structuré par une feuille de route.

Il existe un cadre général à travers “Néo-Terra”, la politique régionale en faveur de l'environnement qui se structure à travers six ambitions : l’environnement, la solidarité, l’agriculture et alimentation, l’économie, la mobilité et l’habitat, la santé.

En 2019, la région Nouvelle-Aquitaine a écrit une feuille de  route numérique responsable. Les objectifs étaient de :  promouvoir et sensibiliser sur le numérique responsable, développer une filière ouverte et compétitive de reconditionnement (27 organismes reconditionneurs recensés, plus de 400 tonnes de déchets électroniques traités…), fédérer et soutenir les initiatives régionales (ex. l’AAP permanent  Innovation numérique responsable), faire de l’institution régionale une entité exemplaire.

La Région Nouvelle-Aquitaine propose un programme de formation “Ambassadeurs numériques responsable” pour aider les décideurs publics ou privés dans la rédaction de leur schéma directeur Numérique responsable.

Depuis juillet 2024, il existe le pôle de compétitivité ENTER”, basé en Nouvelle-Aquitaine qui est dédié au numérique responsable.

La communauté de communes (CC) Maremne Adour Côte Sud regroupe 23 communes pour 70 269 habitants et compte  près de 400 agents territoriaux.

A l’origine, une place donnée au numérique déjà importante

En 2012, la CC MACS équipe les écoles primaires et ses  200 enseignants  en matériel informatique.

Le Président de la CC MACS, Pierre Froustey, participe à l’écriture de la charte Neo Terra. 

La CC MCS est labellisée TEPOS - Territoire à énergie positive.

En 2019, la CC MACS est la première à signer la charte Neo Terra. 

Des prises de conscience qui renforcent le portage politique

Formation de sept agents de la DSI au Numérique responsable par Frédéric Bordage  et obtention du certificat d’INR. Cette formation suscite de nombreuses prises de conscience.

La DSI intègre une Cellule de formation (quatre formateurs) pour animer des ateliers numériques à destination des citoyens, des agents et des élus.

Désignation d’une vice-présidente chargée  du numérique  (Frédérique Charpenel, maire de Soustons). 

Crise COVID : prises de conscience collectives des “ubiquités numériques”. Chacun mesure que le  numérique est partout et qu’avec le numérique chacun peut être partout. 

Aujourd’hui, il y a un portage politique plus fort qui permet de déployer une stratégie “numérique utile”.

Des priorités pragmatiques

En raison d’un manque d’exemples et du peu de retours d’expériences disponibles  au moment de faire des choix, les premières décisions ont été prises de façon opérationnelle et opportuniste. 

Exemples : rallonger la vie des équipements, éteindre le wifi la nuit, réparer le matériel, réduire le nombre d’écrans par poste de travail, acheter du matériel reconditionné, paramétrer les copieurs en recto-verso, mode rétention et en trame noire à 85% par défaut, utiliser du papier recyclé…

A voir aussi : l’expérience de l’ANTIC Pays Basque, le Label IA (Limoges)

Accompagner et sensibiliser

Les 23 communes ont transféré la compétence informatique à la CC MACS. La DSI de la CC accompagne désormais les communes dans leurs choix et usages techniques. Cela passe aussi par : la sensibilisation au numérique responsable à travers une séquence NR dans tous les modules de formation existants, des challenges internes (journée sans mail)…

Un bilan vertueux

L’évaluation régulière des actions permet de mesurer la réduction des impacts des usages numériques de la CC MACS.

Les économies réalisées (en énergie, matériels et consommables)  permettent de financer les nouveaux investissements à engager.

• “Ecrire sa feuille de route ou son schéma directeur selon les étapes suivantes : Compréhension > Mesures > Décisions >  Actions”, Vincent Courboulay,
• “Avoir conscience que c’est un challenge qui doit s'inscrire dans le  temps long et rester ludique et pédagogique”, Fabien Zaccari.
• “Rester humble (car les technologies et les connaissances  évoluent très vite) et respectueux du vivant”, Jean-Paul Chiron.   

Vincent Terny
vincent.terny@pqn-a.fr