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Parole d’acteur #5 – Yann Le Formal, responsable Mission Régionale Politique de la ville à la DREETS

Equipe PQN-A , Laurence Liégeois
Publié le 19/05/2022
Temps de lecture : 8 min
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Début 2022, Yann Le Formal, responsable mission régionale Politique de la ville à la Direction Régionale de l’Economie, de l’Emploi, du Travail et des Solidarités (DREETS) quitte ses fonctions. Nous sommes ainsi partis à sa rencontre, juste après son départ à la retraite. Il a alors partagé avec nous un peu de sa longue expérience dans la Politique de la ville.

1/ Comment vous présenteriez-vous ?

Yann Le Formal,  jeune retraité récent, je viens de travailler 48 ans, dont une trentaine d’années dans l’administration de l’Etat comme contractuel. D’abord autour des questions d’immigration et ensuite de Politique de la ville, les deux étant étroitement liées. Avant d’être dans l’administration, je faisais des études sociologiques pour les pouvoirs publics sur des questions de logement, pauvreté, d’immigration, d’insertion, souvent dans un contexte urbain. Ceci dit, originellement, j’ai un diplôme de géographie rurale : rien n’est plus consternant que l’opposition des territoires.

2/ Comment définiriez-vous la Politique de la ville ?

J’essaierais précisément d’éviter de la définir de façon univoque. C’est un objet sinon fuyant, du moins variant, puisqu’elle a beaucoup changé depuis 40 ans, avec des aller/retour permanents. Je m’en tiens souvent à la définition institutionnelle : c’est une politique additionnelle, complémentaire à une politique de droit commun, à destination des habitants des quartiers prioritaires. Elle vise à améliorer leur situation et à rapprocher les quartiers de leur environnement urbain. De façon plus analytique, j’ai toujours estimé que la Politique de la ville était une politique non assumée  de gestion de l’immigration en France. Si l’on regarde un peu en arrière, la Politique de la ville est née au début des années 1980, d’une difficulté pour les jeunes de ces quartiers à se sentir intégrés dans la société française, et parallèlement, d’une difficulté pour la société française à les accepter.

3/ Quel regard portez-vous sur les Quartiers Prioritaires de la Politique de la Ville (QPV) de Nouvelle-Aquitaine ?

Ils sont très difficiles à définir d’un seul tenant car ils sont d’une extraordinaire diversité. Beaucoup se situent dans de petites villes. De plus, ils ont des caractéristiques démographiques très différentes : ceux que l’on trouve dans les grands espaces urbains comme Bordeaux, Pau, Limoges, etc., n’ont rien ou peu  à voir avec Guéret , Saintes ou Sainte Foy le Grande. La future géographie prioritaire devra passer par une réflexion critique sur  les critères de pauvreté retenus en 2014, et/ou sur la pertinence des outils mis en œuvre. Le problème est que l’on n’a pas réellement adapté les outils de la Politique de la ville à la géographie prioritaire mise en place en 2014. Cela doit nous poser des questions, et d’ailleurs les élus s’en posent. Les agents de l’Etat également. Moi, je fais l’hypothèse qu’il faut travailler différemment sur des entités différentes ; nous avons écrit en 2018 un texte collectif (Etat , PQNA et Collectivités) à destination du CGET sur ces questions.

4/ Comment êtes-vous venu à la Politique de la ville ?

J’y suis venu presque par force, au sens où l’Etat, avec la suppression du FASILD et la création de l’ACSé, nous a donné cette mission d’animation régionale de la politique de la ville en 2005, suite aux émeutes dans les quartiers et sans transition. A l’époque, je suis directeur régional d’un établissement public qui traite alors de l’intégration des migrants et de la discrimination, et en quelques semaines, mon équipe est transférée vers l’Agence de Cohésion Sociale et d’Egalité des chances (ACSE), créée suite aux émeutes sans qu’aucune réflexion n’établisse la logique de ce transfert. On s’intéressait aux migrants, donc on pouvait s’intéresser aux quartiers ? Pourquoi pas, mais cela se pense et se construit…On l’a construit à postériori, plus ou moins, mais de là à dire que cela a été pensé…

5/ De quoi êtes-vous le plus fier professionnellement ?

Toutes les réalisations, même celles que j’ai impulsées, ont toujours été éminemment collectives. Par exemple, nous sommes aujourd’hui au Rocher de Palmer. J’ai participé un peu à la mise en place de cet équipement et cela constitue une fierté ! Mais côté Etat, c’est surtout le résultat du travail et de la créativité de la Préfecture de Région, Monique Lafon en particulier, et de Jean-Michel Lucas pour la Direction Régionale des Affaires Culturelles (DRAC) également. Une de mes grandes fiertés, c’est tout de même d’avoir pas mal contribué à l’émergence de la problématique des discriminations dans les politiques publiques. Je suis assez content de m’être associé au groupe national qui a mis les pieds dans le plat, parce que ça n’était quand même pas évident à l’époque. Après, notamment au niveau régional , le rôle de l’Etat est un rôle d’impulsion, d’accompagnement des talents, de soutien à la créativité de terrain, de gestion d’enveloppes, de mise en relation, d’appui  aux agents publics en relation directe avec les acteurs et les habitants, etc…et d’explicitation des politiques nationales. Pas toujours le plus simple.

6/ Quel est l’échec dont vous avez tiré le plus d’enseignements ?

Je viens de parler de la question des discriminations. Il y a une chose que je considère comme un échec collectif, c’est de voir qu’aujourd’hui, cette question est largement minorée dans les politiques publiques. Pourtant, les problématiques sont toujours aussi vivaces sur le terrain. Je pense que nous en sommes en partie responsables en interne des structures de l’Etat chargées de porter ces questions : un manque de pédagogie, un peu trop d’idéologie et pas assez de capacité stratégique à l’inscrire dans les politiques publiques. Cela a presque disparu aujourd’hui des politiques publiques, ou cela surnage dans la valorisation de la diversité.

L’enseignement, c’est que rien n’est jamais gagné ! Il faut toujours avoir en tête que la Politique de la ville ne fonctionne que si des gens s’y activent, en haut et en bas. L’administration locale, sur des sujets compliqués comme l’immigration ou les quartiers, se donne parfois le choix d’appliquer ou non les politiques nationales. Donc, s’il n’y a pas un rapport de force des acteurs de terrain, relayé par des agents de l’administration, les choses ne se font pas. Les dispositifs requièrent autre chose qu’une circulaire et un guide méthodologique. Il faut aussi un minimum de courage. C’est valable pour les discriminations, mais j’ai aussi bien d’autres exemples en tête dans les champs du logement, de la participation citoyenne, etc.

7/ Un petit mot pour PQN-A avant de se quitter ?

Ma relation avec PQN-A est très ancienne. J’ai été, sous la houlette de  Monique Lafon, et avec l’appui ensuite de Jean-Philippe Haufeurt au Conseil régional, à l’origine de la création du centre de ressources à la fois urbain et rural, à partir d’une cellule existante positionnée à la Préfecture de Région, au SGAR. Depuis 1999-2000, j’ai suivi de très près les activités et le développement de PQA qui est ensuite devenu PQN-A.

Le GIP a beaucoup évolué, et j’ai envie de dire à la nouvelle équipe que c’est le moment de reprendre le collier. Je pense que l’intuition que l’on avait eue en 2000 de travailler en même temps sur les deux types de territoires est validée, et bien portée aujourd’hui par la nouvelle équipe en construction. Beaucoup de choses se font, des jeunes arrivent, enfin… Ça repart bien, et j’y crois. PQN-A a un rôle super important à jouer, de lien entre les territoires, les acteurs, les projets. De lien mais aussi d’observation, et de réflexion critique. Je  crois assez utile de retrouver le côté effronté et décalé de la première équipe coachée par Monique Lafon. 

Vous souhaitez en savoir plus ?

Retrouvez la page de la politique de la ville ici.

 

Contactez-nous !

Laurence Liégeois, chargée de mission Politique de la ville

E-mail : laurence.liegeois@pqn-a.fr

Tél : 07 56 36 28 14

 

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