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Comment approvisionner l'aide alimentaire en produits locaux, quelles stratégies ?

Publié le 06/04/2021
Temps de lecture : 9 min
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Deux projets et un même questionnement : comment arriver à intégrer plus de produits locaux et frais dans les denrées distribuées via l’aide alimentaire. Prix, contractualisation, planification, logistique etc. Comment construire des partenariats durables tout en évitant de “créer une filière pour pauvres” ?

Cet atelier de codéveloppement a été proposé dans le cadre du cycle de rencontres “Alimentation sociale et solidaire” en février 2021. Retrouvez le compte rendu et le replay de la plénière dans l'article dédié aux côtés des autres synthèses d’ateliers.

Les “commanditaires” de cet atelier de codéveloppement étaient :

  • Fanny Leleu - Chargée de projet alimentation solidaire pour le CAPÉE (Comité des alternatives poitevines pour l’emploi et l’entraide) à Grand Poitiers. Fanny Leleu accompagne les dix épiceries sociales et solidaires adhérentes au CAPÉE.
  • Charles Lecomte - Chargé de mission agriculture bas carbone et alimentation à la Communauté d’Agglo Pau Béarn Pyrénées. Dans le cadre du projet alimentaire territorial, Charles Lecomte travaille avec le Centre Communal d’Action Sociale (CCAS) et les associations d’aide alimentaire pour faciliter l’accès à plus de produits locaux et de qualité.

 

Deux structures qui accompagnent les acteurs locaux de l’alimentation solidaire locale

 

Le CAPÉE

Le CAPÉE met en réseau et en synergie depuis plusieurs dizaines d’années les structures de l’insertion, de la solidarité et de l’emploi. Aujourd’hui installé sur le Grand Poitiers, il travaille main dans la main avec les structures locales. L’objectif est d’apporter des réponses et des solutions économiques et sociales aux habitants de la communauté urbaine.

Dans le champ de l’alimentation solidaire, le CAPÉE coordonne et accompagne le réseau des épiceries sociales et solidaires de Grand Poitiers. Situées majoritairement sur Poitiers, ces épiceries font appel à lui dans le cadre de leur approvisionnement. Ainsi, le rôle de Fanny Leleu est de coordonner les approvisionnements dans une logique de mutualisation des achats.

Aujourd’hui, les approvisionnements sont divers. Grâce à l’adhésion au réseau ANDES et donc au Crédit National Épicerie Solidaire (CNES), Fanny Leleu peut acheter ce qu’elle veut où elle veut. Cela lui permet de répondre au mieux à la demande des épiceries adhérentes. Elle complète avec les dons de la banque alimentaire qu’elle ne choisit pas.

 

Pour en apprendre plus sur le CAPÉE, consultez la fiche d'expériences croisées aux côtés des Greniers de Mézos, association locale des Landes (40)

 

La communauté d'agglomération Pau Pyrénées

La politique de la communauté d’agglo de Pau dans le champ de l’agriculture et de l’alimentation se concentre vers une agriculture bas carbone.  La collectivité développe une ceinture verte grâce au projet éponyme “Ceinture Verte”  qui vise à accélérer l’installation de jeunes agriculteurs. En parallèle Charles Lecomte, chargé de mission, travaille avec le CCAS sur les questions d’accès à une alimentation locale et de qualité pour tous.

Le CCAS coordonne le réseau des associations locales travaillant sur l’aide alimentaire. Toutes se connaissent et travaillent relativement bien ensemble grâce à l’intelligence collective et au travail du CCAS.

Pour la communauté d’agglo comme pour le CAPÉE, la crise covid les a amenés à s’interroger sur le fonctionnement de l’aide alimentaire dans leur territoire et à conforter les dynamiques initiées durant cette période.

 

Une situation inédite qui en mars 2020 bouleverse les habitudes d’achat vers plus de produits locaux
 

Dans les deux cas, la situation inédite de mars 2020 a permis la mise en place d’aides publiques exceptionnelles venant de la région à Pau et à Poitiers. Ces financements avaient pour but de soutenir l’approvisionnement de l’alimentation solidaire en produits locaux. Ainsi l’approvisionnement en produits locaux qui n’avait jamais vraiment été questionné jusque-là est devenu une priorité. Grâce aux financements, tous ont pu introduire des produits locaux et frais dans les rayons des épiceries sociales et solidaires.

Avec le recul, si le passage de l’idéal à l’action a été parfois difficile, à Pau comme à Poitiers les acteurs aimeraient garder voire développer cet approvisionnement local. De plus, comme l’explique Charles Lecomte :

“Dans la Grande et Moyenne Surface (GMS), on s’améliore sur le gaspillage et du coup on a de moins en moins de déchets pour les pauvres.”

Fanny Leleu rejoint ce constat de diminution des produits frais disponibles côté GMS. Elle complète les approvisionnements avec “Les jardins de la Méditerranée, un Atelier Chantier d’Insertion (ACI) basé à Avignon. L’ACI produit des fruits et légumes, fait des ramasses et récupère les invendus de Rungis avant d’expédier les denrées dans toute la France. Si ce système fonctionne bien aujourd’hui, sur le long terme Fanny aimerait trouver des sources d’approvisionnement plus proches de Poitiers ou a minima dans le département.

 

De nombreux freins opérationnels à solutionner

 

L’expérimentation au printemps 2020 a mis en lumière les nombreux freins à l’approvisionnement local. L’objectif de cet atelier était de les soumettre à la vingtaine de participants afin de trouver des pistes de travail grâce à l’intelligence collective.

Les problématiques soulevées sont multiples :

  • Les modèles de fonctionnement des épiceries sociales et solidaires sont hétérogènes de par leur statut juridique et les besoins de leurs bénéficiaires. Il est donc difficile de trouver des solutions d’approvisionnement communes.
  • L’approvisionnement en produits locaux se heurte à la question du coût. Il est difficile de concilier produits à bas coûts et rémunération suffisante des producteurs locaux.
  • Les épiceries connaissent mal les réseaux de producteurs locaux susceptibles de les approvisionner.  Plus globalement, le monde de l’aide alimentaire est très éloigné des logiques des agriculteurs.
  • L’offre est insuffisante. En effet, les producteurs locaux pouvant distribuer des produits frais ne produisent déjà pas assez pour couvrir la demande. Si l’un d’entre eux aujourd’hui a le choix, il choisira la vente directe. Elle s'avère plus rentable que les réseaux d’alimentation solidaire.

Ainsi, trois questions ressortent :

  • Quels partenariats pour attirer les agriculteurs vers un marché aujourd’hui très peu investi par les entrepreneurs locaux ?
  • Quel budget pour favoriser l’accès à des produits de qualité aux plus précaires tout en rémunérant correctement l’agriculteur ?
  • Quelle logistique mettre en place pour mieux organiser la demande et la rendre plus lisible et donc attractive ?

 

Quelques pistes de solutions

La consultation des participants a amené de multiples pistes de réflexion. On y retrouve :

La recherche des partenaires et structures ressources : des opportunités de collaboration

  • Concernant la mise en lien avec les agriculteurs, plusieurs relais sont à envisager. Les structures les plus pertinentes sont les coopératives, syndicats de maraîchers, associations et structures agricoles en général. Par exemple, des groupes de travail pourraient aider à mieux comprendre les enjeux de chaque partie et ainsi trouver des accords. Du côté de Pau, l’agglomération travaille déjà sur son Projet Alimentaire de Territoire (PAT) avec le collectif fermier 64. C’est une porte ouverte à tout un réseau d’agriculteurs et donc à une diversité de productions qui pourraient correspondre à la demande. L’association Mont’Plateau dans la Vienne (86) (Cf. Annuaire des démarches alimentaires de Nouvelle-Aquitaine) est un bon exemple. Elle accompagne les établissements scolaires en parallèle d’un travail avec le groupe de producteurs fournisseurs de la restauration collective. De cette façon, les deux groupes avancent dans leurs pratiques et les problèmes sont résolus collectivement.
  • Les acteurs spécialisés comme les grandes surfaces ou les marchés d’intérêt nationaux peuvent être ressources également sur le sujet. Leur professionnalisme en matière de contractualisation, de logistique, de commerce et de connaissance des producteurs peut s’avérer précieux. Même si leur fonctionnement n’est à priori pas tourné vers des logiques de solidarité en dehors du don des invendus, des coopérations inédites peuvent se construire.
  • Dans le même esprit, les structures publiques ou privées travaillant aux achats, à la transformation ou la distribution en lien avec la restauration collective seront ressources. Des synergies, d’autant plus du côté des structures publiques, sont envisageables sur l’approvisionnement ou la logistique par exemple.

 

Le passage à l'action "éclairé" : un diagnostic précis au départ, des actions "témoin" avant de se lancer

  • Il est important de structurer la démarche et donc l’offre. Il faudra pour les deux structures commencer par comprendre exactement quels sont les besoins des épiceries. Pour proposer une commande claire et pérenne pour le producteur, il faudrait avant tout passer par le recensement des besoins. Ce recensement peut se faire avec un questionnaire ou via des entretiens avec les épiceries. On peut également envisager une opération de suivi rigoureux des achats sur 2 mois. Cela permettra de quantifier les besoins au plus près pour la suite.
  • Comme pour beaucoup d’actions expérimentales : commencer petit. Afin “d’essuyer les plâtres” à petite échelle et donc à moindre risque, il peut être envisagé de faire des essais. Partir sur une ou deux productions bien ciblées, travailler avec une épicerie test, etc. Ainsi, bien comprendre le besoin, proposer une commande claire puis garantir les quantités sur une petite échelle peut être un bon moyen de commencer des partenariats avec des professionnels. De la même façon, un participant propose une expérimentation à l’échelle d’une seule épicerie.
  • Diverses autres propositions sont évoquées comme :
    • Se rapprocher d’autres réseaux confrontés aux mêmes problématiques de prix;
    • ou encore aller chercher le gaspillage à la source dans les exploitations légumières.

 

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