0 - Etablir un cahier des charges
Pour conduire une démarche de contractualisation, il est important de s'appuyer sur un socle commun. Pour ce faire, il est essentiel d'élaborer un cahier des charges. C'est souvent un document que l'on établit quand on veut externaliser une prestataire mais pas seulement. C'est aussi un document qui va faire référence pour ceux qui vont s'engager dans le travail. Il fixe les objectifs que l'on se donne, le calendrier, les étapes par lesquelles on va passer, les moments de validation dont on aura besoin. Cela permet d'engager le travail avec les différentes parties prenantes sur une base qui sera partagée, connue, et sur laquelle chacun peut s'engager. Cela donne aussi au coordinateur / animateur de la démarche un document auquel il peut se référer.
1 - Le temps du diagnostic
La phase de diagnostic constitue le socle de la démarche de contractualisation. C'est le temps où on croise les regards, où on peut émettre un avis sur la situation du territoire. C'est un moment fédérateur car il fabrique du consensus.
C'est aussi un moment où on adopte une vision dynamique : le diagnostic, ce n'est pas juste une photo "à l'instant T", c'est une trajectoire dans laquelle s’inscrit le territoire. Que l'on soit à l'échelle d'un quartier, d'une commune, d'une intercommunalité, d'un groupement de collectivités, d'un département : on a toujours des acteurs et des échelles territoriales qui nous entourent et qui conduisent eux-mêmes des actions sur notre sujet. C'est donc très important de se resituer par rapport à son environnement. Cela permet de souligner les grandes tendances, de poser les bases et le contexte dans lequel on se situe.
Le diagnostic, c'est aussi partager des éléments quantitatifs, objectifs, sur les dynamiques du territoire. Selon votre position (élu, acteur local, technicien, habitant..), vous n'aurez pas la même interprétation de la donnée.
2 - La phase d'identification des enjeux
Avant de commencer à penser au plan d’action, il faut prendre le temps d’identifier les problématiques qui découlent de ce diagnostic : c'est cela que l'on appelle les enjeux. Ils sont formulés sous forme de questions. La phase d'identification des enjeux est une étape pivot et centrale.
Prenons l'exemple d'un territoire girondin que la Région Nouvelle-Aquitaine a accompagné. Les diagnostics réalisés par le territoire et la Région Nouvelle-Aquitaine montraient une croissance démographique exceptionnelle, un vieillissement de la population élevé et une part importante de retraités dans la population. Dans ce cas précis, la formulation de l'enjeu était la suivante : "Comment adapter la dynamique d'accueil du territoire face à une forte pression foncière et aux évolutions démographiques, notamment le vieillissement de la population ?".
On voit, grâce à cet exemple, que la formulation des enjeux revient à identifier ce qui fait commun parmi les éléments de diagnostic. Quand on travaille à une démarche de contractualisation, on ne travaille pas verticalement : on appréhende les éléments dans leur ensemble, en transversalité, et on les relie les uns aux autres. C'est un moment qui peut être difficile, et qui demande de l’entrainement, mais c'est une étape essentielle.
Il faut aussi veiller à hiérarchiser les enjeux identifiés: le territoire n’aura pas les moyens de tout traiter d’un coup. Quels sont ceux qui nous semblent les plus prioritaires ? Quels sont ceux qui sont essentiels à travailler pour répondre efficacement aux besoins identifiés dans le diagnostic ?
3 - La formalisation de la stratégie
Pour répondre aux enjeux identifiés, il faut formaliser une stratégie globale. Une stratégie, c'est un chemin, un horizon vers lequel on tend, à parcourir collectivement. Elle est composée d'axes stratégiques précis, qui invitent à imaginer des solutions, avec toutes les parties prenantes. La stratégie doit parler à tout le monde : chacun doit trouver son rôle, et sentir qu'il peut contribuer à la mettre en œuvre. Les axes stratégiques sont formulés sous forme de verbes d'action, à l'infinitif, pour donner de la force à l'intention.
Reprenons l'exemple du territoire sud girondin que j'évoquais précédemment. La formulation de l'enjeu (cf "Comment adapter la dynamique d'accueil du territoire face à une forte pression foncière et aux évolutions démographiques, notamment le vieillissement de la population ?") a donné lieu à la formulation de l'axe stratégique suivant : "Adapter la dynamique d'accueil pour garantir la cohésion territoriale" (avec deux sous-axes : "réduire les inégalités territoriales et renforcer les solidarités" et "relever les défis nés de la dynamique d'attractivité du territoire").
A ce stade, on voit bien le chemin : on ne dit pas encore "comment" on veut y aller, mais on voit là où on veut aller.
4 - Le plan d'actions
Afin de savoir 'comment" on veut y aller, on formalise un plan d'actions. C'est la boîte à outils.
Il faut se dire qu'on ne part pas de rien quand on se lance dans une démarche : il y a des acteurs, des pratiques, des actions.
Toutefois il ne s’agit pas de se baser uniquement sur l’existant pour formaliser son plan d’action. Si on établit une stratégie, c'est que vraisemblablement le territoire n'a pas répondu à tous les enjeux, avec les actions existantes. Il faut bien sûr valoriser celles qui font sens et qui peuvent contribuer à répondre à la stratégie, mais il faut aller au-delà en construisant de nouvelles réponses opérationnelles adaptées aux objectifs que l'on s'est assignés.
Pour ce faire, on fait appel à l'intelligence collective. On organise un dialogue, on croise les regards, on débat, on confronte les points de vue,. Dans ces moments-là, on voit souvent surgir des choses auxquelles on n'aurait pas pensé. On n'a alors pas forcément d'éléments sur lesquels s'appuyer pour étayer cette sensation (qui n'est pas issue du diagnostic), mais on sait que c'est un élément important à aller investiguer, voire à expertiser. C'est là que naissent les "chantiers clés" (selon la définition empruntée à la Région). Ils représentent ces sujets à investiguer, sur lesquels on va mobiliser de la ressource (expertise, prestation, acteurs) pour voir si ça fait sens.
Reprenons un exemple d'un territoire, au sein duquel un élu avait signifié qu'il était interpellé par le fait que sa population avait de plus en plus de mal à accéder à des médecins, alors que c'est un territoire où il y a pléthore de professionnels de santé. D'autres élus ont alerté sur ce même sujet, cela a créé des échanges et du débat. On l'a donc placé comme un chantier clé et on a engagé un travail avec l'Agence Régionale de Santé (ARS), l'Observatoire Régional de Santé (ORS), on a fait tout un diagnostic. Après 3 ans de travail, on en est arrivés à la création d'un contrat local de santé (CLS) à l'échelle du territoire de projet.
S'il n'y a pas d'élus identifiés sur le territoire sur la thématique, il faut aller chercher des élus qui sont en responsabilité ou qui ont dans leur mandat un sujet qui se rapproche. Ensuite, il faut imaginer des temps dédiés avec eux. Par exemple, il est possible d'organiser une conférence des maires.
Aussi, il faut poser les bases avec eux. Quand on leur parle de ce qui les intéresse, et qu’on est clair sur ce qu’on ne pourra pas faire, on peut leur montrer le champ des possibles.Il faut être en dialogue, à leur écoute et aller vers eux, pas seulement les inviter mais bien les impliquer dans la démarche. Ils doivent comprendre leur place, leur rôle, et comment ils peuvent contribuer aux objectifs : c'est un travail de proximité.