CAPEE et le Grenier de Mézos : Créer des lieux favorisant la solidarité et le local, deux exemples aux échelles et visions différentes
Les deux initiatives présentées dans cette fiche participent à la création de lien social, facilitent l’action locale et l’ancrage d’emplois. Tantôt dans des quartiers Politique de la ville tantôt en milieu ultra rural, l’action du CAPEE et du Grenier de Mézos accompagnent les populations locales vers une alimentation plus durable. Si les deux actions se situent à des échelles différentes, chacune a su adapter son action à ses valeurs et au contexte local. Elles partagent une volonté de proposer plus de produits locaux et de qualité aux bénéficiaires de leur action.
Lien social, lutte contre le gaspillage, création d’emplois, valorisation de produits locaux, inclusion sociale et solidarité … autant de mots qui font sens pour le Comité des Alternatives Poitevines pour l’Emploi et l’Entraide (CAPEE) et l’association Le Grenier de Mézos. Ces deux initiatives ont été présentées lors d’un atelier du Forum régional « Agriculture, Alimentation et Territoire » le 13 février 2020 à Angoulême par :
- Jean-François HERAULT, Directeur – CAPEE, réseau d’initiatives sociales et solidaires – Poitiers (86) ;
- Thomas JEANSON, Président – Association Le grenier de Mézos (40).
Le CAPEE, un réseau d’acteurs et d’initiatives du Grand Poitiers autour des questions d’insertion et de solidarité
Le CAPEE, c’est quoi ?
Il s’agit d’un réseau d’acteurs qui lutte contre toutes les formes d’exclusion. Il agit “pour le développement de l’insertion et de l’entraide” dans le territoire de la communauté urbaine du Grand Poitiers.
Il fédère aujourd’hui une quarantaine de structures adhérentes qui favorisent toutes le développement économique, social et solidaire de Grand Poitiers dans une dynamique de coopération. Le CAPEE soutient également la mise en place de nouvelles initiatives qui œuvrent pour l’accès à l’emploi et la création d’activité et de lien social.
Il est ainsi l’animateur de ce réseau d’acteurs et s’engage autour de trois axes :
- Le développement économique local, social et solidaire ;
- Le laboratoire d’innovation sociale locale et durable ;
- L’animation du réseau d’acteurs socio-économiques
Au sein des structures adhérentes, on retrouve des épiceries sociales et solidaires. Le CAPEE assure en appui leur coordination et leur mise en réseau.
Coordinateur et animateur d’un réseau d’épiceries sociales et solidaires
Le CAPEE coordonne et anime un réseau de 12 épiceries sociales et solidaires, localisées sur Poitiers, Migné-Auxances, Buxerolles, Lusignan, Chauvigny et Chasseneuil-du-Poitou. Il les accompagne sur la diversification de leur approvisionnement, en participant notamment à la réflexion territoriale autour d’un approvisionnement local et de qualité.
Trois restaurants solidaires de Poitiers font aussi partie du réseau. Le CAPEE les soutient dans leur démarche de promotion santé-nutrition. Ces derniers profitent des achats groupés car le collectif s’organise en fonction de centres d’intérêts communs.
Les épiceries sociales et solidaires du Grand Poitiers
Les épiceries sociales et solidaires proposent des produits de consommation courante (alimentation, hygiène, entretien) à des tarifs adaptés aux personnes qui connaissent des difficultés financières. Les critères d’accès et les durées sont variables en fonction de l’organisation de chaque épicerie. Elles sont généralement portées par des associations ou des collectivités.
Dans le réseau du Grand Poitiers, le portage des épiceries est divers. Certaines sont portées par des centres sociaux de quartiers, d’autres encore par des bénévoles. Il y a donc une pluralité de situations et de modèles économiques. Ces épiceries concernent environ 1 600 familles soit plus de 4 300 personnes.
Les épiceries adhérentes au CAPEE peuvent bénéficier de son appui mais ne sont pas pour autant limitées dans leurs approvisionnements. Chacune est libre de s’approvisionner où elle le souhaite.
Des exemples d’actions mise en place par le réseau
Des animations et des événements de sensibilisation
Ces actions sont programmées sur les sujets de la santé et de l’alimentation à destination des publics en difficulté. En effet, il existe un véritable enjeu de compréhension et de sensibilisation autour de l’équilibre alimentaire et du budget, souvent délaissé par les familles les plus modestes. C’est pourquoi, au départ, le CAPEE a mis en place des ateliers de cuisine.
Du glanage alimentaire
Le CAPEE explique que certaines personnes âgées ont un jardin pour l’autoconsommation. L’idée est de leur proposer d’intervenir pour l’entretien du jardin en échange d’un don du surplus de légumes du jardin aux épiceries sociales et solidaires.
Mutualiser les moyens pour plus d’efficience et de clarté
L’objectif de la mise en réseau est aussi de mutualiser les moyens entre les structures. En effet, un poste a été créé pour faciliter cette mutualisation. Financements assurés par le Grand Poitiers, l’État via la Politique de la ville et le Département. Ce poste permet de :
- Faire des commandes groupées ;
- D’avoir un seul interlocuteur pour les fournisseurs ;
- Et, de fait, faire baisser le prix final.
Aussi, ce poste mutualisé a permis de travailler sur le gaspillage alimentaire dans une optique d’amélioration continue. En effet, il est ainsi possible de mieux optimiser la denrée alimentaire et d’utiliser des produits frais.
> Le réseau d’épiceries sociales et solidaires et le PAT du Grand Poitiers
Le CAPEE ne peut mener seul la réflexion autour de l’approvisionnement en circuits alimentaires locaux. Il a cherché a cet effet des partenariats à l’échelle nationale. Cependant, pour Jean-François Hérault, ce n’est pas très durable.
L’enjeu aujourd’hui est de toucher davantage de producteurs locaux à travers les approvisionnements des épiceries. C’est pourquoi, le CAPEE souhaite s’inscrire dans la dynamique du PAT du Grand Poitiers. En effet, cela pourrait être plus simple voire facilitateur pour favoriser la vente de produits locaux. Aujourd’hui, 20% des produits des épiceries sociales et solidaires émanent des producteurs locaux.
Le Grenier de Mézos ou le bric-à-brac solidaire des Landes
Le premier employeur de la commune
Le Grenier de Mézos est une association créée en 2002 comme activité de bric-à-brac. Mézos est une commune d’environ 1 000 habitants située en milieu rural des Landes et dans un secteur peu peuplé.
L’association est le premier employeur de la commune. Ce bric-à-brac emploie 11 salariés qui collectent, trient et vendent les dons des habitants du territoire pour lutter contre le gaspillage et l’exclusion. Les invendus sont donnés à des associations qui les valorisent.
Reconnu dans le territoire avec une activité en croissance depuis 12 ans, l’association a dû changer plusieurs fois de local pour réussir à stocker tous les dons. Aujourd’hui, le Grenier de Mézos prend ses quartiers sur un terrain de 2 hectares dans un bâtiment de 1 500 m² et un hangar de 700 m².
Toutefois, la situation n’est pas simple car avec moins de salariés, l’équipe traite le même tonnage qu’une recyclerie qui dispose de plus de personnes. D’après Thomas Jeanson, il faut donc faire attention à l’aspect ergonomique du travail.
Une association 100% auto-financée par et pour les habitants
Cette association est 100% auto-financée par et pour les habitants, ce qui en fait sa particularité. Il s’agit d’une activité économiquement viable sans aides publiques car ce sont des objets donnés par les gens.
Dans la mesure où l’association n’est pas comptabilisée comme structure d’insertion par l’activité économique, il n’y a pas beaucoup de turn-over dans les salariés. Ces derniers ont ainsi pu développer un vrai savoir-faire.
Le développement d’un nouveau projet : la cantine à prix libre
Depuis novembre 2019, le Grenier de Mézos développe un autre axe. En effet, en partie grâce à la récupération de produits alimentaires, le Grenier de Mézos a ouvert une cantine à prix libre pour les salariés, les adhérents et les habitants. La cuisine emploie 1 salarié de 9 à 14h00 durant 5 jours pour servir environ 25 repas par jour.
Tout le monde a accès librement à un repas complet à condition d’être adhérent (1 euro par an).
Rétablir le lien avec les producteurs locaux
D’après Thomas Jeanson, “en France, le lien entre producteurs et consommateurs n’existe que très peu comparé en Espagne où il a pu être créé grâce aux structures coopératives”. C’est pourquoi, ils essaient aujourd’hui de recréer ce lien pour rendre le système plus résilient et durable et rétablir des liens avec les producteurs.
L’exemple des épiceries sociales et solidaires, de manière générale, montre quelques limites à ce sujet. Pour lui, ce sont des systèmes qui ne permettent pas toujours de valoriser l’alimentation locale auprès des personnes dans le besoin. En effet, ces dernières n’ont pas toujours connaissance de ces commerces. Pour lui, il est nécessaire “d’avoir des systèmes plus informels”.
Ces liens permettent aussi de faire évoluer la grande distribution. « Nous, si on va une fois par semaine chez Leclerc, cela nous permet de parler avec les magasiniers, le responsable et, au travers de l’échange, de faire évoluer leur vision de la grande surface. »
D’un point de vue communication, le Grenier de Mézos a décidé de “faire” et pas de “communiquer”. Il leur semble que leur rôle n’est pas de dire aux gens “recyclez, mangez bio, etc.” mais de faire passer le message à travers leurs actions concrètes.
“Nous, on fait le job mais on ne dit pas c’est bien, c’est mal.”
Vous voulez les contacter ?
Fanny LELEU
Chargée de projet alimentation solidaire
06 87 64 88 87 / alimentation.solidaire@capee.fr / www.capee.fr
Thomas JEANSON
Président du Grenier de Mézos
05 58 42 65 00 / contact@grenier-mezos.fr / grenier-mezos.fr