1/ Comment est-ce que vous vous présenteriez ?
Je suis originaire de la Haute-Vienne et Limougeaud de naissance. J'ai vécu mon enfance en péri-urbain, ce qui m'a donné envie de vivre en ville. J'ai toujours travaillé dans un territoire rural. Très vite dans mon parcours professionnel, je suis arrivé sur des postes de chargé de mission avec de l'autonomie. Aujourd'hui, je suis chef de projet territorial, je fais du management de projets avec une équipe d’une dizaine de personnes au sein du PETR Monts et Barrages. Au cours de mes études, j'ai obtenu un master "manager territorial" et aujourd'hui je suis manager territorial, c'est limpide, non? Pendant mon Master 2, j'ai également enseigné la comptabilité, le marketing et de l’économie générale dans une école d'esthéticienne-cosmétique, été postier 20 heures semaine. Je ne vis pas sur le territoire sur lequel je travaille et j'y vois des avantages, des inconvénients aussi, beaucoup de kilomètres au quotidien.
2/ Comment est-ce que vous décririez votre territoire ?
Le territoire Monts et Barrages est assez loin d'un centre urbain. C'est un territoire accueillant et humain. Ce qui fait un territoire, c'est avant tout les gens qui y vivent. On a des gens simples, intelligents et d'une grande ouverture d'esprit. Les gens qui ont envie de s'investir sont ceux qui font la colonne vertébrale du territoire. On peut discuter avec tout le monde très facilement... et on va vers des projets. Quand un porteur de projet nous présente son initiative liée à un projet de vie, on lui donne des conseils, des préconisations et on le met en réseau d'autres contacts. La plupart du temps, ces personnes ont la capacité d'intégrer la dynamique du territoire pour alimenter leur propre projet. C'est la meilleure façon de faire territoire. J'essaye d’avoir la capacité à comprendre ce que font les autres, c'est mon parti pris aujourd'hui. Mon job au PETR est de véhiculer ça. Je suis un faiseur de liens.
On a un taux de chômage de 6,4%, mais derrière ce chiffre, il y a des gens. On s'interroge sur qui sont ces personnes. Mon job est de les considérer et de trouver des projets adaptés. L'expérimentation Territoire zéro chômeurs longue durée (TZCLD) est une évidence de ce point de vue là. On a pris le parti d'aller voir ces gens. Impliquer une personne sans emploi dans le montage de sa propre entreprise est un outil de remobilisation très fort qui répond aux enjeux de notre projet de territoire.
3/ C’est quoi le développement territorial selon vous ?
Le développement est le maître-mot. C'est d'abord un mouvement. Il ne faut pas être statique. Comment on se développe? Qu'avons nous envie de développer ensemble sur le territoire? C'est le projet de territoire qui répond à cette question. Les élus se demandent collectivement sur quels points ils ont envie de travailler. A partir de là, on décide de bouger tel ou tel point.
Depuis jeune, je m'intéresse à la manière dont un territoire fonctionne. J'ai toujours été fasciné par la complémentarité de ce qui fait la vie dans un espace. Pourquoi on a eu un patrimoine de la chaussure sur le territoire? Pourquoi la mondialisation a détruit une grande partie de ces activités? Comment un territoire réagit à court, moyen et long terme considérant tous ces contextes? Je suis intéressé par l'armature et l'aspect macro du territoire. Je m'y retrouverais moins si j'étais dans une entreprise avec des considérations essentiellement microéconomiques.
4 / Quelle est votre plus grande fierté ?
C'est la concrétisation des projets qu'on a impulsés ou accompagnés qui m'apporte beaucoup de satisfaction. Avoir permis la création du Cabas de Saint-Bonnet-Briance qui a remis une activité dans un village où il n'y avait plus de commerce. On a travaillé avec des habitants. L'épicerie a ouvert en 2016 et elle est toujours ouverte en 2023.
Le tiers lieu l'Escalier à Saint-Léonard-de-Noblat avec la création d'une belle dynamique territoriale. TZCLD est une très belle démarche en cours où des centaines de personnes ont été mobilisées.
Au sein du PETR, une grande satisfaction est de contribuer à faire en sorte que l'équipe s'entende bien et de nous permettre de se réaliser professionnellement dans des projets qui ont du sens.
5/ Quel est votre lieu ressource ?
Je me ressource dans des lieux que je connais. Chez moi en regardant un film que je connais par cœur par exemple. Il y a des films que j'ai vu 30 fois comme American beauty, Eternal sunshine ou Somewhere.
6/ Quelles sont les ressources que vous mobilisez régulièrement ?
On a des métiers où il y a énormément de ressources techniques (juridiques, comptable, réseaux…). On est des animateurs avec une connaissance très fine de qui fait quoi pour faire aboutir des projets. Une ressource importante pour un développeur, c'est une forme de savoir-être, une aisance à prendre contact avec les gens, à synthétiser une idée et à embarquer les gens dans un projet.
7/ Quel est l’échec dont vous avez tiré le plus d’enseignements ?
J'ai beaucoup de mal avec l'échec. Je suis un compétiteur dans l'âme. J'ai eu un échec qui m'a beaucoup appris. On menait une étude de faisabilité économique avec un appel à candidature pour trouver un restaurateur en 2013, j'avais 24 ans à l'époque. J'étais en comité de sélection avec des élus et les candidats. Il y avait 2 porteurs de projet pour reprendre l’établissement. On reçoit un couple de Lillois avec deux enfants qui nous présente son projet. J'ai senti qu'ils avaient la capacité à réussir. En face, on avait un restaurateur chevronné. On a retenu ce dernier, il a coulé 4 ou 5 mois plus tard, c'était un mauvais gestionnaire… Ces Lillois sont partis ; ils n'ont pas pu concrétiser leur projet professionnel et leur projet de vie en Haute-Vienne. On a fait un choix cartésien. Aujourd'hui je ferai un autre choix. L'instinct et le volet humain sont hyper importants à prendre en compte. J'en parle souvent aux développeurs que je côtoie.
8/ Quel(s) message(s) souhaitez-vous faire partager à vos pairs ?
Je suis comme la majorité d’entre nous. Je ne laisserai pas de trace. On est des personnes de l'ombre. On ne travaille pas pour nous. On travaille pour nos élus. Si nos élus laissent une trace, alors, on aura bien travaillé.
9/ Quelle est votre relation à PQN-A ?
PQN-A est aujourd'hui le seul réseau qui me permet de rencontrer d'autres développeurs. PQN-A, c'est une vision innovante qui permet systématiquement de se réinterroger sur ce qu'on fait. PQN-A a une vision très juste du développement local. J'aime bien les visites sur site, c'est intéressant de venir sur une commune avec l'alimentation technique apportée par les autres professionnels.
10/ Qu'est-ce qui vous motive pour demain?
C'est la création et l’accompagnement de projets innovants qui permettent de réunir les gens sur un sens commun. Je peux citer deux projets à venir: une réflexion liée à notre label pays d'art et histoire avec l’intégration d'un centre d'interprétation de l'architecture et du patrimoine (CIAP) du territoire et le développement d'un projet culturel avec une compagnie de théâtre nationale “le Singe” et une association locale dans la reconquête d'un ancien abattoir à Eymoutiers.