Un repas végétarien, “c’est un repas, point”
Au cours de la journée, les intervenants n’ont eu de cesse de répéter qu’un “repas végétarien, c’est un repas, point”. Pointant ainsi du doigt la stigmatisation dont peut faire l’objet un repas sans protéines animales, ils ont écarté les préjugés. La présentation de ces bénéfices a permis de confirmer la nécessité de redonner la place que mérite au repas “végétarien” : celle de repas tout court.
Des bénéfices pour la santé
Tout d’abord, la santé. Les conclusions de l’étude de l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (Anses) sur l’impact des menus végétariens dans les cantine sont formelles. En effet, il n’existe pas de modification d’apport en nutriments dans les menus sans viande et sans poisson, par rapport à ceux qui en contiennent. Par ailleurs, aujourd’hui les enfants consomment jusqu’à trois fois leurs besoins en protéines. Alors que pour les menus végétariens, ils en consomment tout de même 2,5 fois.
Des bénéfices pour l’atténuation du changement climatique
Un repas avec des protéines végétales limite la contribution au changement climatique. En effet, aujourd’hui, l’alimentation est le deuxième secteur d’émissions de Gaz à Effet de Serre (GES). Il se situe ainsi après celui des transports. En cela, la Stratégie Nationale Bas Carbone (SNBC) prévoit une réduction de 19% en 2030 et de 46% en 2050 des émissions de GES concernant l’alimentation, par rapport à 2015. L’évolution de la demande alimentaire via une prise en compte des préconisations nutritionnelles est un des leviers pour parvenir à ces objectifs. L’autre moyen est la réduction du gaspillage alimentaire.
Des bénéfices sur le budget des cantines ?
Enfin, il existe des effets sur le budget des cantines, même si les résultats sont pour le moment disparates. D’après l’évaluation de l’expérimentation du menu végétarien hebdomadaire dans les écoles par le Conseil Général de l’Alimentation, de l’Agriculture et des Espaces Ruraux (CGAAER), il existe trois effets :
- aucune variation du budget,
- les économies réalisées dégagent du budget pour des produits Signes d’Identification de Qualité et d’Origine (SIQO) les autres jours (y compris pour les protéines animales),
- une hausse, du fait de temps de préparation allongé, d’achat de produits SIQO ou bien de produits industriels ultra-transformés.
Actionner le levier de la lutte contre le gaspillage alimentaire pour maîtriser les coûts
D’autre part, le rapport du CGAAER note également des effets disparates sur le gaspillage alimentaire. Toutefois, celui-ci est réduit lorsque :
- les plats sont savoureux,
- que les portions sont adaptées,
- que l’expérimentation avance.
Partageant ce constat, Grégory Houssine (CROUS de Poitiers), James Frodeau (chef cuisinier du Lycée du Bois d’Amour), Sylvestre Nivet (Directeur de la Restauration collective à la Ville de Poitiers) et Elodie Bonnafous (Elue à la ville de Poitiers) s’accordent sur les mesures efficaces pour réduire le gaspillage. Elles sont notamment mises en place à Poitiers :
- former et accompagner l’ensemble des équipes de cuisine,
- faire maison,
- choisir pour commencer des plats simples et appréciés,
- communiquer avec les convives, informer sur les préjugés nutritionnels,
- lorsqu’il y a un choix multiple :
- mettre le plat végétarien en premier,
- ne pas l’estampiller “plat végétarien”. Il faut en effet préférer décrire son contenu (comme c’est fait avec le reste des plats). Exemple : “lasagnes aux légumes du soleil”, tel que “lasagnes au bœuf et champignons”.
Le repas avec protéines végétales, une occasion de revaloriser l’image du chef en restauration collective…
Les chefs cuisiniers présent ne s’en cachent pas, le courrier de l’Etat les obligeant à passer à un repas végétarien hebdomadaire dès novembre 2019 est plutôt mal passé. Cependant, dans la pratique, et après une formation, ou “après avoir tout simplement goûté”, Grégory Houssine confie qu’ils ont pris cela comme une invitation à cuisiner davantage.
Du côté de James Frodeau, il propose depuis dix ans une alternative avec protéines végétales aux lycéens du Bois d’Amour. De plus, depuis quatre ans, il propose aussi un menu végétarien hebdomadaire. En effet, pour lui, l’enjeu du repas avec protéines végétales c’est de cuisiner, et non plus d’assembler. C’est une invitation à la créativité culinaire. En effet, cela l’incite à aller chercher des idées dans la cuisine du monde.
Après les interventions des élus et techniciens poitevins et du Centre Ressource d’Ecologie Pédagogique d’AQuitaine (CREPAQ), du matin, place à l’action pour les participants. Tout d’abord, un atelier pour utiliser tous ses sens en cuisine. Il permet en effet de réfléchir à la valorisation des produits auprès des enfants. Puis, un atelier de composition des menus végétariens. Ses objectifs ? Apprendre à équilibrer les apports nutritionnels et maîtriser l’empreinte carbone de l’assiette.
Les recettes sont à retrouver ici et ici.
…et l’attractivité du métier ?
Ainsi, faire des repas végétariens c’est cuisiner plus en retrouvant le plaisir des savoir-faire et de l’apprentissage continu… Mais comment faire dans une situation déjà très tendue dans la profession, où les établissements ont du mal à recruter. Et doivent parfois assembler et acheter du transformé par manque de personnel ?
La réponse figure sans doute dans l’évolution de la formation initiale. En effet, Jean-Yves Delamaide, directeur délégué aux formations professionnelles et technologiques au Lycée Kyoto, présente le projet d’Ecole régionale de la restauration collective de la Région et dont son financement est de 100 000 euros. Ainsi, la carte des formations pourrait faire la part belle au travail et à l’adaptation des menus aux produits végétaux de saison. Une occasion selon lui, de rendre plus attractive la profession auprès des jeunes diplômés des lycées hôteliers. C’est d’ailleurs une cause chère au grand chef cuisinier Régis Marcon. Il a été juré en 2021 du 1er Concours “chefs et équipiers de cuisine des lycées”.
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