Article co-rédigé par Sarah Costes, autrice de l'étude et chargée de mission Alimentation, Unité Alimentation à la DRAAF Nouvelle-Aquitaine et Maïwen Hoden, chargée de mission développement territorial chez PQN-A.
De quoi parle-t-on ?
Les systèmes agri-alimentaires sont à l’origine de dégâts environnementaux et sanitaires aujourd’hui largement documentés : maladies professionnelles, obésité, émissions de gaz à effet de serre, pollutions des eaux et des sols, effondrement de la biodiversité, etc.
En ce sens, les pouvoirs publics ambitionnent de renforcer la prise en compte des enjeux de santé-environnement dans les politiques agricoles et alimentaires. Une volonté récemment renforcée au travers de la loi Climat et Résilience de 2021 comportant le titre SE NOURRIR et le chapitre : « soutenir une alimentation saine et durable pour tous peu émettrice de gaz à effet de serre ».
Dans les territoires, cette ambition est notamment portée par Les Projets alimentaires territoriaux, dits PAT, et introduits dans la loi d’avenir pour l’alimentation, l’agriculture et la forêt (LAAF) de 2014, avec « l'ambition de fédérer les différents acteurs d'un territoire autour de la question de l'alimentation, contribuant ainsi à la prise en compte des dimensions sociales, environnementales, économiques et de santé de ce territoire » (MASA). Un dispositif de reconnaissance des PAT est mis en place à partir de 2017, puis révisé en 2020 avec l’instauration de deux niveaux de labellisation.
Les PAT sont un outil prometteur qui offre notamment l'opportunité de créer de nouveaux types de partenariats sur les territoires et d’ouvrir des espaces de concertations en mettant en réseau des acteurs territoriaux et du monde agricole, publics, professionnels ou associatifs, qui n'avaient pas l'habitude de collaborer ensemble. Les scientifiques soulignent d’ailleurs la pertinence d’une déclinaison des politiques agri-alimentaires à l’échelle territoriale, car c’est à ce niveau-là que se développent les interactions sociales les plus favorables au changement.
Dans ce contexte, la Région Nouvelle-Aquitaine ambitionne de faire des PAT des outils transversaux concernant la prise en compte des enjeux de santé-environnement, une volonté notamment inscrite dans l’élaboration de la 4e édition du Plan régional santé environnement (PRSE) qui comporte désormais un volet alimentation. A ce titre, la Région Nouvelle-Aquitaine porte également la feuille de route Neo Terra qui reprend notamment le concept scientifique One Health (une seule santé) et dans laquelle s’inscrit la signature d’un Pacte Alimentaire régional Etat-région.
A l’échelle de la Nouvelle-Aquitaine, PQN-A constate que le sujet santé-environnement est de plus en plus abordé dans les PAT. En effet, lors d’une enquête menée en 2021, seuls 35% des chargé.es de PAT déclarent traiter les enjeux santé-environnement contre 74% en 2023.
Dans ce contexte, et alors que la future Stratégie nationale pour l'alimentation, la nutrition et le climat (SNANC) prévoit de renforcer les attendus en matière de santé et d'environnement, la prise en compte de ces enjeux par les PAT devient un élément important dans l'examen des demandes de labellisation. La Direction régionale de l’agriculture de l’alimentation et de la forêt (DRAAF) de Nouvelle-Aquitaine a donc mené une étude pour définir le rôle des PAT dans l’intégration des enjeux de santé et d’environnement liés à l’agriculture et à l’alimentation.
Que contient l'étude ?
- Un panorama des leviers d’actions territoriales à mettre en œuvre pour des systèmes agri-alimentaires favorables à l’environnement et à la santé;
- La caractérisation du rôle des PAT dans la mise en œuvre de ces leviers d'action et identification des freins rencontrés à leur déploiement ;
- Des recommandations pour lever les obstacles à l'efficacité des PAT dans les territoires, afin d'améliorer leur impact sur les questions de santé et d'environnement.
En bref, ce que l'on retient
L'étude souligne l'importance d’adopter une approche holistique en traitant simultanément les enjeux de santé et d’environnement, plutôt que de les envisager en silo. Les leviers d’actions territoriales présentés mettent en évidence des solutions intégratives qui bénéficient à la fois à l’environnement et à la santé, selon une approche One Health et qui s’articulent autour d’une transition systémique, à 2 volets :
- une transition agroécologique vers la diversification des productions sur les territoires et vers une agriculture biologique diversifiée ;
- une transition alimentaire vers l’établissement d’environnements alimentaires favorables à l’adoption de comportements alimentaires sains et durables. Ce point défends la nécessité d’agir sur les déterminants qui conditionnent les comportements alimentaires en favorisant une meilleure accessibilité physique, géographique, économique, socio-culturelle et informationnelle à une alimentation saine et durable.
L'étude met également en évidence les freins et difficultés rencontrées par les chargé.es de PAT à investir les enjeux de santé-environnement et de poser des recommandations pour favoriser leur montée en compétence sur le sujet.
Ainsi est soulignée l’importance capitale du portage politique dans le passage à l’opérationnalité des PAT sur ces sujets. Il apparait donc nécessaire d’inscrire les PAT dans une dynamique de travail transversale avec les autres politiques territoriales : l’urbanisme, le commerce, le transport, etc. Dans ce contexte les PAT manquent parfois de légitimité vis à vis des acteurs privés qu'ils souhaitent mobiliser, plaidant en ce sens pour la mise en œuvre d’un cadre réglementaire qui contraigne le secteur privé à s’engager dans une démarche de durabilité, et sur lequel les chargé.es de PAT pourraient s’appuyer. Enfin, les résultats font mention du manque de moyens humains et financiers des PAT, un frein majeur à leur passage à l’opérationnalité.