Envie 2E Aquitaine, pionnière du réemploi des panneaux solaires en France
Lauréate de l’appel d’offres passé par l’éco-organisme Soren, l’entreprise d’insertion a inauguré à Saint-Loubès (33), en septembre 2022, un site de réemploi et de traitement des panneaux solaires. Une première pierre dans la structuration d’une filière française de valorisation.
Structure Porteuse : Envie 2E Aquitaine
Problème / Besoin initial
Valorisation ou broyage?
Envie 2E Aquitaine, spécialisée depuis 2005 dans la collecte d’équipements électriques et électroniques, a remporté en 2021 l’appel d’offres passé par l’éco-organisme Soren pour collecter et traiter les panneaux photovoltaïques usagés. “Jusqu’à maintenant, tous les panneaux photovoltaïques étaient envoyés au broyage”, souligne Pierre Tauzin, le responsable de site. En effet, depuis son inauguration en septembre 2022, le site installé à Saint-Loubès, près de Bordeaux, a de quoi faire : 20 000 panneaux stockés à l’extérieur attendent déjà d’être décadrés.
“Toutes les salariées que nous avons recrutées avaient travaillé comme serveuses, coiffeuses, ou femmes de ménage. C’est très bien, mais on est quand même dans le stéréotype de genre. Les femmes peuvent travailler dans d’autres milieux professionnels. Nous avons donc veillé à mettre en place des outils de manutention et des postes ergonomiques pour éviter le port de charges lourdes, et ainsi faire en sorte que n’importe qui puisse travailler chez nous.”
Partenaires principaux
Techniques et soutiens : l’éco-organisme Soren, l’entreprise japonaise NPC, la mairie de Saint-Loubès
Financiers : la Région Nouvelle-Aquitaine, l’Ademe
Calendrier
- 2021 : lauréat de l’appel d’offres passé par l’éco-organisme Soren
- Août 2022 : réception de la “délamineuse” japonaise
- Septembre 2022 : inauguration du site de réemploi et de traitement
- 2023 : 2000 tonnes traitées
Périmètre d’action de l’expérience et rayonnement
L’arc Atlantique, de Bayonne au Mans
Budget
2 millions d’euros (autofinancé à 75 %)
Solutions apportées
Trois modes de valorisation
L’entreprise d’insertion collecte des panneaux solaires le long de l’arc Atlantique, de Bayonne au Mans, en s’appuyant sur des sous-traitants – de préférence acteurs de l’insertion – pour les villes les plus éloignées de Saint-Loubès. “Mais 60 % des installations photovoltaïques sont dans le Sud-Ouest”, précise Pierre Tauzin. Celles-ci proviennent autant de particuliers que d’entreprises ou de collectivités dont le parc commence à vieillir, et qui, selon le nombre de panneaux, n’ont qu’à les déposer sur des points de collecte, ou à contacter Soren pour les faire enlever. Agréé par l’Etat, l’éco-organisme se finance grâce à l’éco-participation qu’elle perçoit auprès des fabricants de panneaux photovoltaïques.
Trois modes du traitement
À Saint-Loubès, le traitement se déroule de trois façons possibles.
- Si la plaque en verre est cassée, le réemploi ou le démantèlement ne sont pas possibles. Les panneaux sont alors séparés de leur cadre en aluminium et de leur boîtier de jonction, puis envoyés au broyage, dans le Nord de la France.
- Intacts et encore récents, ils passent trois tests différents afin de déterminer s’ils peuvent encore produire de l’énergie. Si c’est le cas, Envie 2E Aquitaine les stock et les vend. “Ces panneaux ont un rendement moindre que des neufs, mais ils sont au minimum à 80 % de leurs capacités initiales, indique Pierre Tauzin. Soren estime que 5 % des panneaux usagés sont réemployables. Leur durée d’utilisation varie entre 15 et 25 ans.”
- Troisième mode de traitement, s’ils ne sont pas réemployables mais intacts, les panneaux sont envoyés sur la ligne de “délamination”, un terme inventé par Envie 2E Aquitaine. Le boîtier de jonction et le cadre en aluminium sont enlevés, puis le panneau passe par une machine afin de séparer la plaque en verre de ses composants métalliques sans les endommager grâce à une lame chauffée à 300 °C. À l’issue de la délamination, Envie 2E Aquitaine obtient donc le laminé, la partie qui permet de produire de l’énergie. Composé d’argent, de silicium, et de cuivre, il est envoyé à Rosi Solar, à Grenoble, pour être recyclé. Ensuite, les plaques en verre partent chez un verrier, les cadres, à la filière de traitement de l’aluminium, et les boîtiers à la filière de valorisation des métaux. “Sur un panneau, le taux de valorisation des matériaux est de 95 %”, se réjouit Pierre Tauzin.
2000 à 3000 panneaux valorisés
Quatre mois après le lancement de cette activité, Envie 2E Aquitaine a traité entre 2000 et 3000 panneaux photovoltaïques. Cette innovation suscite un réel engouement. En témoignent les nombreux articles de presse, mais aussi les innombrables appels reçus par l’entreprise d’insertion pour acheter ses panneaux de seconde main.
7 salariés
L’activité permet d’employer sept personnes, deux permanents, et cinq en insertion professionnelle. Toutes sont des femmes car Envie 2E Aquitaine souhaite dans un premier temps privilégier le recrutement de femmes afin de casser les stéréotypes de genre dans le milieu professionnel. Ainsi, des conseillers en insertion professionnelle, salariés d’Envie, accompagnent ces femmes et les aident à “lever les freins à l’emploi” (mobilité, logement, santé…) et à construire leur projet professionnel. Elles travaillent donc 35 heures par semaine, sont payées au smic et ont signé un contrat à durée déterminée d’insertion (CDDI) de quatre mois renouvelable six fois.
- L’équipe d’Envie 2E Aquitaine dispose d’une solide expérience d’accompagnement social.
- Pierre Tauzin met en avant la capacité d’Envie 2E Aquitaine à innover, prendre des risques, et la grande polyvalence dans les compétences de l’équipe d’encadrement.
- La filière française de réemploi et de traitement des panneaux photovoltaïques est encore très jeune. Envie 2E Aquitaine “défriche” ce domaine d’activité et ne peut pas se référer à d’autres retours d’expérience.
- La machine de “délamination” est un quasi-prototype, une première en Europe. Conçue par une entreprise japonaise, elle est encore en cours de réglage.
- Les opérations réalisées par les salariées en insertion nécessite des compétences plus fines que dans les autres activités d’Envie 2E Aquitaine. Il faut par exemple lire des informations en anglais et analyser des courbes. La formation des salariées est donc plus exigeante.
- À terme, l’objectif de l’entreprise est d’employer 25 personnes en insertion.
- Aussi, elle souhaite traiter 2000 tonnes de panneaux photovoltaïques en 2023, puis augmenter le volume pour arriver à un rythme de croisière de 4000 tonnes par an.
- Enfin, la vente des panneaux photovoltaïques réemployés débutera en 2023. L’entreprise les vendera environ 50 € HT l’unité.
Personne ressource
Pierre Tauzin, responsable de site chez Envie 2E Aquitaine
Date de publication : 31 janvier 2023
Rédigé par Fanny Laison