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01. Eric Labadie ©Fanny Laison

Parole d'acteur #26 - Éric Labadie, commissaire à la lutte contre la pauvreté en N-A

Publié le 02/12/2025
Temps de lecture : 8 min
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Éric Labadie a pris ses fonctions en tant que commissaire à la lutte contre la pauvreté auprès du préfet de la région Nouvelle-Aquitaine en juin 2024. Qu'est-ce qu'un commissaire à la lutte contre la pauvreté ? Quel est son rôle ? Quelles sont ses missions ? Comment agit-il auprès des territoires pour lutter contre la grande précarité ? Ce sont ces questions que nous lui avons posées, voici ses réponses. 

1. Quel est le rôle d’un commissaire à la lutte contre la pauvreté ?

Les commissaires à la lutte contre la pauvreté (CLP) sont rattachés au préfet de région : il existe un CLP par région.

Le rôle d’un CLP est à la fois de s’assurer que les politiques de droit commun prennent bien en compte les personnes les plus précaires ; et de l’autre, veiller à ce que ces personnes bénéficient réellement de ces politiques de droit commun, au nom du principe d’égalité devant la loi, garanti par notre Constitution.

Par ailleurs, le CLP a pour rôle d’identifier les particularités présentes sur chaque territoire donné, susceptibles d’impacter, d’une manière ou d’une autre, la vie des personnes en situation de pauvreté, afin de proposer des solutions, des actions, des dispositifs adéquats pour permettre à ces personnes de sortir de la pauvreté.

2. Quelles sont vos missions ?

Je partage mon temps de travail entre des réunions avec les acteurs des territoires et des rencontres sur le terrain. Le CLP n’a pas de journée type.

Mes missions peuvent se résumer à travers trois verbes : 

  1. IMPULSER les prises de conscience, l’application d’un certain nombre de règles, la mise en place de nouvelles manières d’appréhender le sujet de la lutte contre la pauvreté. Par exemple, depuis que j’ai pris mes fonctions, j’essaie de diffuser et de partager le constat selon lequel il existe en Nouvelle-Aquitaine un sujet spécifique : celui de la pauvreté en milieu rural, particulièrement invisibilisé car touchant en grande partie un public âgé et isolé, difficilement repérable. Je suis identifié par les acteurs des territoires pour faire remonter les problématiques existantes, car je vais parfois être en mesure d'impulser des propositions de solution pour y répondre. Autre exemple, les territoires connaissent une augmentation du nombre de personnes à la rue : il existe des outils pour aider ces dernières à sortir de la rue, les accompagner dans ce processus, grâce à une prise en charge médico sociale, une aide pour revenir progressivement vers une activité (ex: dispositifs d’insertion par l’activité économique).
  2. COORDONNER les services de l’Etat, les services déconcentrés de l’Etat (les directions régionales, départementales), les collectivités territoriales, l’ARS, la CAF, la MSA, les associations, pour faire en sorte que ces différents acteurs ne perdent pas de temps à ne pas travailler ensemble. Car ne pas travailler ensemble sur le sujet de la lutte contre la pauvreté, c’est une perte de temps.
  3. PILOTER les crédits de droit commun (qui dépendent d’autres acteurs) et les crédits dédiés à la lutte contre la pauvreté via les crédits du Pacte des solidarités, sous l’autorité du préfet de région.

Pour impulser, coordonner et piloter, le CLP anime des temps d’échange et de travail avec les acteurs. En tant que CLP, je suis à la fois seul (je n’ai pas d’équipe à mes côtés) et très entouré. Cette animation du réseau des acteurs de la lutte contre la pauvreté prend la forme de groupes de travail partenariaux thématiques. En 2025, j’ai réuni à intervalle régulier trois groupes de travail sur : la lutte contre la précarité alimentaire, la mobilité solidaire et l’accompagnement simultané vers l’emploi et le logement.

Par ailleurs, j’ai également des temps de travail mensuels avec les services des directions départementales ce qui permet à la fois de faire le point sur l'avancée des travaux et de donner à lire la stratégie déployée.

Les missions d’un CLP impliquent par ailleurs beaucoup de déplacements dans les territoires, au moins deux fois par an dans les douze départements. 

3. Quelles sont les priorités nationales et régionales d’un CLP ?

Les priorités nationales ont été redéfinies en 2024 lors de la mise en place du Pacte des Solidarités qui a pris la suite de la Stratégie nationale de lutte contre la pauvreté (2018-2023). 

4 axes structurent le Pacte des solidarités : 

  1. Prévenir la pauvreté et lutter contre les inégalités dès l’enfance ;
  2. Amplifier la politique d’accès à l’emploi pour tous ;
  3. Lutter contre la grande exclusion grâce à l’accès aux droits ;
  4. Construire une transition écologique solidaire.

Ces priorités nationales impliquent pour chaque département ayant contractualisé avec l’Etat sur la lutte contre la pauvreté, la mise en place d’au moins une action par axe.

A côté de ces priorités nationales, il existe des priorités régionales adaptées au contexte et particularités de chaque région. Cela a été établi  lors du dernier Comité de l’administration régionale (CAR) qui s’est tenu le 19 novembre 2025, sous l’autorité du préfet de région, avec l’ensemble des préfets de département, des directeurs, directeurs régionaux et des représentants des opérateurs. 

La volonté de l’Etat au niveau régional en Nouvelle-Aquitaine est de cibler ses actions sur deux types de public particulièrement vulnérables : 

  • d’une part, les familles monoparentales et plus particulièrement le public des femmes précaires, cheffes de familles monoparentales, qui sont davantage touchées par la pauvreté que le reste de la population (trois fois plus que les familles non monoparentales) ; 
  • et d’autre part, les personnes âgées de plus de 75 ans, public surreprésenté en Nouvelle-Aquitaine parmi les personnes pauvres.

Par ailleurs, l’Etat en Nouvelle-Aquitaine souhaite prioriser ses actions sur les territoires ruraux, dans lesquels vit une personne pauvre sur trois. J’ai d’ailleurs demandé à l’Insee N-A de produire des données sur la pauvreté en milieu rural en Nouvelle-Aquitaine afin de mieux en saisir les contours. 

4. Comment agissez-vous au niveau des territoires pour lutter contre la pauvreté ?

J’agis en travaillant en très fort lien avec les directions départementales (les DDETS et DDETS-PP) qui sont pour moi les maîtres d'œuvre de la lutte contre la pauvreté sur les territoires.

Mon action consiste à essayer de soutenir toutes les propositions au regard des moyens d’action et des moyens financiers dont je dispose et à rendre lisible et cohérent l’ensemble des moyens financiers dont disposent les directions départementales et régionales. Je fais donc de la coordination de budgets opérationnels de programme.

Par ailleurs, je co-anime avec la DREETS une cellule à disposition des directions départementales de l’Etat, ce qui permet d’aller chercher des financements lorsqu’on en manque.

Je suis également un relais d’informations sur des AAP ou sur d’autres opportunités, à destination des directions départementales ou régionales. Le CLP dispose d’un grand nombre d’informations et de contacts en raison de ses nombreux liens avec les différents acteurs des territoires, sur un ensemble de sujets. 

5. Un projet en cours dont vous aimeriez nous faire part ?

Oui, sur l’Agglomération de La Rochelle (17), nous avons initié et financé en 2024 avec les crédits du Contrat local des solidarités, deux projets complémentaires sur la lutte contre le sans-abrisme qui se déploieront jusqu’en 2027 :

  • Un projet d’accompagnement des personnes âgées sans abri, de l’hébergement d’urgence vers le logement, en travail avec un EHPAD de la Rochelle, afin de permettre à ces personnes de finir leur vie dans de bonnes conditions ; 
  • Un projet visant à accueillir les animaux des personnes à la rue afin que ces dernières puissent effectuer leurs démarches administratives (sociales, d’insertion..), ce qui n’est pas pas possible si la structure n’accueille pas les animaux.

Il s’agit de beaux projets parce qu’ils visent des personnes en situation de très grande pauvreté et de très grande détresse, appartenant à deux typologies de public différentes : les personnes âgées et une population plus jeune. 

Ces deux projets témoignent par ailleurs de l’existence d’une alliance locale forte entre l’Etat départemental, représenté par le préfet de la Charente-Maritime et le Conseil Départemental de la Charente-Maritime. En effet, en 2025, le Conseil Départemental de la Charente-Maritime est venu compléter les financements Etat alloués à ces projets, ce qui a permis d’amplifier la dimension de l’action réalisée.

6. Un sujet qui vous tient particulièrement à cœur ?

L’objectif final de la lutte contre la pauvreté, c’est avant tout de permettre aux personnes en situation de pauvreté d’accéder à des conditions de vie dignes et de retrouver leur pouvoir d’agir.

Parmi mes convictions, il y a le lien entre lutte contre la pauvreté et emploi, parce que l'emploi dans les sociétés post industrielles qui sont les nôtres, doit être un outil de restructuration de la place des individus dans la société et une source de revenus. Il s’agit donc d’une vraie préoccupation de savoir comment on accompagne les personnes qui sont durablement exclues de l'emploi.

Pour finir, je dirai que la solidarité fait partie intégrante du Pacte républicain, c’est un impératif énoncé par notre Constitution, garant de la cohésion nationale.

6. Quelques ressources à partager ?

Contact

Eric Labadie, 05 56 90 65 51 / 06 79 68 59 38

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