Accompagner la mobilité des habitants vers des pratiques moins impactantes en ce qui concerne les émissions de GES, implique de réinterroger la manière de conduire les actions : Quels acteurs mobiliser? A quelle échelle devons-nous envisager la réflexion? Sommes- nous bien dans une coopération multi-acteurs et multi-niveaux? Quels sont les partenariats qui peuvent être construits et mobilisés? Pour quels effets? Nos différents témoins nous ont permis d’aborder les volets de la coopération en ce qui concerne les mobilités.
Intervenant.e.s
- Marion Lavaud, CC Pays Uzerche, directrice générale des services
- Camille Bouron, CA La Rochelle, directeur de la stratégie et des coopérations territoriales
- Edith Goudard, Mob’ In Nouvelle- Aquitaine, chargée de mission
- Jean- Philippe Estrade, ADEME, référent Pôle territoire durable et référent Mobilité
La communauté de communes (CC) du Pays d’Uzerche est un territoire peu dense qui se caractérise par des paysages vallonnés et un éloignement des différents centres d’activités et de services, ce qui se traduit par des déplacements longs et contraints par la voiture. La CC n’a pas pris la compétence mobilité et elle est intégrée dans le périmètre d’un Contrat Opérationnel de Mobilité (COM) avec deux autres CC non autorités organisatrices de mobilités. Des coopérations en faveur des mobilités existent entre les trois CC malgré des niveaux d'appropriation et d’engagement qui sont différents. La CC est également lauréate de l’appel à manifestation d’intérêt “Avenir Montagnes Mobilités “ qui a pour objet de faciliter les mobilité durables, innovantes et de proximité sur le premier et dernier kilomètre des territoires de montagne.
Marion Lavaud, DGS de la CC Pays d’Uzerche, fait part d’une coopération complexe à mettre en place : pour proposer des services communs, il serait nécessaire qu’un seul établissement porte le projet pour le compte des autres, mais c’est une décision administrative et politique lourde, qui n’a pas la préférence des communautés de communes. Les marchés relatifs à la mise en place d’un transport à la demande, commun à deux EPCI, ont dû être passés de manière distincte (conformément à la réglementation), ce qui entraîne deux opérateurs et par conséquent un manque de lisibilité pour les usagers.
Le pôle métropolitain Centre Atlantique constitue un territoire de coopération entre dix intercommunalités, relevant de trois départements et deux régions, qui constituent le grand bassin de vie Niort- La Rochelle. Le pôle n’est pas porté par une structure juridique propre, mais les membres ont élaboré une charte commune et travaillent conjointement sur les priorités arbitrées, dont la mobilité fait partie. Le sujet des mobilités a été investi tout d’abord en réaction à la création de la LGV Paris Bordeaux pour laquelle les territoires traversés ne tiraient pas bénéfice de cette nouvelle infrastructure. Ces territoires ont choisi de se regrouper pour garantir une approche plus locale de la question des mobilités et répondre aux enjeux issus des mouvements pendulaires et des nombreuses interactions entre les différentes unités territoriales.
Camille Bouron, directeur de la stratégie et des coopérations territoriales de la CA La Rochelle, fait part de l’élaboration commune d’un livre blanc TER métropolitain qui permet de se positionner en co- acteurs et d’ aller vers une feuille de route régionale. Il cite également la réalisation de la ligne de car express entre Niort et La Rochelle à titre expérimental pour une durée de deux ans comme une action concrète issue du travail de coopération, en lien avec le le syndicat Nouvelle-Aquitaine Mobilités et la Région Nouvelle-Aquitaine.
Sur le territoire de la CC du Pays d’Uzerche, des liens se tissent avec différents acteurs pour traiter les problématiques d’inclusion sociale, comme par exemple le partenariat avec une association d’insertion qui propose un service de location de véhicules électriques sans permis pour les personnes en insertion économique. Afin de toucher tous les publics, un travail en faveur de la mobilité des actifs va être initié avec les entreprises du territoire pour le développement du covoiturage.
A l’échelle de la Nouvelle-Aquitaine, intervient le réseau Mob’ In Nouvelle-Aquitaine, association qui regroupe les acteurs de la mobilité inclusive et solidaire (c'est-à-dire qui répondent aux besoins des publics empêchés). Mob’In les accompagne dans leurs actions (écoles de conduite solidaires, garages solidaires, services de location, conseils mobilité, transport d’utilité sociale). Ce champ d’intervention est vaste et passe nécessairement par la coopération entre les acteurs publics et les acteurs privés à l’échelle locale. Edith Goudard, chargée de mission au sein de Mob’In, note l'importance des plateformes de mobilité pour structurer les services à l’échelle locale et l’intégration de l’intermodalité, pour prendre en compte tout le trajet, du premier au dernier kilomètre, dans une démarche globale d'écomobilité. Un des autres enjeux de ce secteur est la professionnalisation des acteurs qui doit aussi permettre un meilleur croisement entre mobilité solidaire et mobilité durable.
Le programme Tims a pour objectif de développer la mobilité durable et inclusive en France. Financé par les Certificats d’économie d’énergie (CEE), il vise à accompagner la mise en place de solutions de mobilités plus sobres à destination des personnes les plus vulnérables Les sept projets financés en Nouvelle-Aquitaine sont des projets de coopération entre collectivités ou entre collectivités et acteurs privés.
Pour conclure la table ronde, Jean- Philippe Estrade de l’ADEME partage le constat selon lequel la coopération s’impose pour construire l’offre à partir du besoin et pour travailler sur les bassins de mobilité sans s’arrêter à la limite administrative. Il propose une synthèse sur les principaux enjeux de transitions territoriales directement liés aux mobilités :
Un enjeu financier conséquent tout d’abord, avec une dépense annuelle de 15 milliards d’euros en Nouvelle-Aquitaine pour répondre aux besoins énergétiques, dont 50% concernent la mobilité des personnes et le transport de marchandises.
Un enjeu de réduction des mobilités, ensuite, pour tenir l’objectif 2050 de neutralité carbone, qui s’incarne dans les différents scenarii de l’ADEME
Des leviers pour agir :
- La promotion du télétravail pour réduire les déplacements,
- La lutte contre l’autosolisme avec un meilleur taux de remplissage des véhicules,
- La coopération entre les territoires pour développer des services partagés de mobilité et le report modal (ex. : lignes de covoiturage, pistes cyclables intercommunales).