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Instances formelles du dialogue territorial : qu’est-ce qu’on y gagne, qu’est-ce qu’on y perd?

Publié le 29/09/2025
Temps de lecture : 12 min
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Le dialogue territorial constitue une notion englobante et est intrinsèquement lié à l’animation territoriale et donc au développement local. La pratique du dialogue territorial repose sur les fondamentaux du développement local, dans lequel la participation des parties prenantes forme le moyen de conduire le projet de territoire et de porter des actions.

 

L’instauration progressive d’instances formelles dédiées au dialogue territorial et à la participation des acteurs du territoire peut apparaître comme une reconnaissance du besoin de dialogue à l’échelle locale ou encore comme un certain aboutissement dans la capacité à faire contribuer les parties prenantes. Toutefois, ces instances, si elles apportent un cadre et une reconnaissance qui peuvent être bienvenus, ne portent-elles pas également un nouvel éloignement entre les collectivités et les parties prenantes?

 

C'est à partir de ce questionnement que les participant.e.s au forum des développeurs 2025, qui s’est tenu les 12 et 13 juin derniers à Mont-de-Marsan, ont échangé témoignages, pratiques et idées issues de leurs expériences professionnelles.


 

Cadrage du sujet : instance et mise en dialogue, de quoi parlons-nous?

Quels enjeux pour la participation et la contribution des acteurs des territoires ?

Le dialogue territorial, c’est avant tout revenir aux fondamentaux du développement territorial, afin d’éviter que le dialogue territorial devienne un instrument au service de questions posées à l’avance, retombant dans des logiques de concertation ou une consultation limitée…


Or, un vrai dialogue doit s’en donner les moyens, bien hiérarchiser les « espaces », clarifier leurs rôles spécifiques (ce qu’ils sont et ce qu’ils ne sont pas). Ainsi, il faut distinguer un dispositif d’écoute, voire de médiation, d’une instance participative, de co-construction voire de  co-décision.

 

Le dialogue territorial renvoie aux moyens et aux compétences que l’on donne à l’animation du dialogue et de la participation, dont la qualité (modes d’expressions et de travail) est la garantie d’une production qui interpelle les décideurs publics. Cela passe par des règles éthiques, partagées entre les protagonistes : une forme de parité et d’équité entre ceux qui dialoguent (on parle à la même table, dans une égalité de place, et on met tous les éléments du débat sur la table). 

 

En bref, le cadre du dialogue territorial étant bien posé (le “comment”), il peut permettre de se concentrer sur le “pourquoi”, les enjeux à résoudre collectivement.

Filipe Arretz Bidean

Quelles sont les instances formelles de dialogue territorial que nous sollicitons?

Pour les agent.e.s de développement local des territoires de Nouvelle-Aquitaine présent.e.s, les instances dites “formelles” de dialogue territorial recouvrent plusieurs formes :

 

  • Les conseils de développement (CODEV)

Créés par la Loi Voynet en 1999 et re-officialisés par la loi NOTRe dans les EPCI et PETR de plus de 50 000 habitants, les conseils de développement sont une représentation des acteurs socio-économiques et la société civile d’un territoire et participent activement à l’élaboration des projets de territoires. Leurs périmètres d’intervention et de consultation varient d’une structure à l’autre.

Pour en savoir plus sur les conseils de développement, découvrez  la coordination nationale des conseils de développement

En Nouvelle-Aquitaine, une coordination régionale des CODEV permet un travail à l’échelle régionale.

 

  • Les Groupes d’Action Locale (GAL)

Les GAL sont créés  dans le cadre de programmes européens (LEADER - mesure du FEADER, avec une ouverture récente sur une mesure du FEDER pour les autorités de gestion ayant retenu cette possibilité). Sans personnalité juridique, les GAL sont composés d’acteurs publics et privés qui représentent les différents intérêts du territoire. Ils sont en charge de l’élaboration d’une stratégie de développement local, de sa mise en œuvre et de la sélection des projets locaux pouvant bénéficier de ces fonds européens. Ils  s’appuient sur des structures juridiques existantes, publiques ou privées. Pour en savoir plus sur les GAL, découvrez LEADER France.

 

  • Assemblées citoyennes et conseils citoyens

Les assemblées citoyennes et les conseils citoyens ont pour trait commun d’ouvrir les espaces de dialogue entre élus et citoyens, et de permettre l’implication de ceux-ci sur des projets, des décisions locales… Il n’y a pas de modèle type, mais autant de modes de fonctionnement en fonction de la volonté locale. Le degré d’impact sur la décision est plus ou moins marqué, en fonction des autorités publiques qui structurent des modes de participation citoyenne.

En Nouvelle-Aquitaine, l’assemblée citoyenne et populaire de Poitiers se distingue par la place laissée à la co-construction des décisions.

 

  • Des commissions “ad hoc” pour construire et conduire ensemble des démarches

Dans le déploiement des démarches de développement local, certains dispositifs appellent la mise en place d’instance de dialogue pour la conduite de ces derniers. Il peut s’agir de comités de pilotage, de comités techniques, de commissions thématiques,.... Ces commissions ont une vocation plus restreinte que les instances décrites ci-dessus, mais contribuent toutefois au paysage du dialogue territorial mis en place à l’échelle des structures de développement local. À titre d’exemples : commission économie, comité de pilotage en charge de contractualisations, ….


 

Quelles sont nos pratiques professionnelles ?

Les éléments soulevés par les agent.e.s de développement :

  • Le dialogue territorial ne passe pas forcément par des instances formelles.
  • Les personnes mobilisées dans nos instances sont-elles vraiment représentatives de la pluralité des acteurs du territoire?
  • Quelle mobilisation mettre en place/ attendre de ces différentes instances?
  • Plus on a de dispositifs, plus on multiplie les instances de dialogue.
  • L’institutionnalisation des territoires (ex. passage d’asso en SM, pour le PETR, loi sur les Codev…) et l’institutionnalisation des dispositifs contractuels (Région, Etat) ont complexifié le dialogue territorial et réduit le temps donné au projet stratégique, au travail avec les acteurs…
  • Les instances de dialogue territorial revêtent des contours et des formes différents en fonction de leurs rôles : comment expliquer *simplement* aux parties prenantes ces différentes instances?
  • Quelle place pour les institutions partenaires dans les instances locales de dialogue territorial?
  • Plusieurs types de dialogue sont en jeu : dialogue au sein du territoire, mais aussi entre les collectivités, avec les partenaires institutionnels, Département, Région, Etat.
  • Un glissement d’un dialogue direct, inter-acteurs, à un dialogue par dispositif (le copil de la Région sur le contrat local, par ex.)
  • Les élus sont perdus dans ce système de dispositifs et d’instances… (« illisibilité, épuisement »). Il ne faut pas les noyer dans ces multiples participations, mais les mobiliser dans leur rôle clé : la décision
  • Les secrétaires de mairie représentent en milieu rural un réseau essentiel de dialogue qu’il faut animer
  • Dans le cadre des échanges entre la Région et les territoires : la mise en place de la politique contractuelle repose sur différents temps d’échanges, qui intègrent des temps de dialogue sur la stratégie et des temps de dialogue sur les projets.

Les verbatims

 

“Le GAL (Groupe d’Action Locale) est devenu une chambre d'enregistrement et c’est dur d’animer une chambre d’enregistrement!”
 

“Tant que nous serons sur des organes consultatifs, le fonctionnement des instances de dialogue territorial sera soumis à la bonne volonté des élus” 
 

“Ce qui est important, c’est la stratégie de territoire, qui est la base et qui est forcément élaborée avec les parties prenantes”

Le dialogue territorial et l’agent.e de développement local : les réflexions issues des témoignages

  • Dans la conduite des projets et dans l’animation territoriale en général : il y a un basculement - voire une inversion - qui s’est opéré ces dernières années. Avant, on était réellement dans la démarche ascendante, avec des projets des acteurs des territoires qu’on accompagnait dans la construction et dans la recherche de financement. Aujourd’hui, on nous donne des dispositifs dans lesquels les projets et le dialogue doivent s’inscrire, ce qui renforce la logique de guichet.
  • Le dialogue territorial appelle l’idée de coopération entre les acteurs et la nécessité de la transversalité des sujets.
  • Au sujet des conseils de développement : le fonctionnement par collèges permet d’aller vers des acteurs qui ne sont pas forcément constitués en réseaux, mais demeure un problème de représentativité (peu de jeunes, pas assez de femmes,....)
  • Concernant les GAL :  trois type de fonctionnement sont observés, en fonction de la dynamique locale : 1) simple comité de sélection ; 2) instance de dialogue ; 3) instance de travail collectif, d’émergence de projets nouveaux

Quelles sont les pistes d’actions pour progresser dans le dialogue territorial?

  • Dans les différentes instances, il est important de distinguer sur lesquelles mobiliser plus fortement acteurs et élus pour faire un travail de fond, au détriment de réunions plus techniques moins intéressantes. Il faut contribuer à une simplification des démarches de dialogue pour ne pas perdre les apports de cette dernière dans l’animation territoriale. Est-ce qu’il ne faut pas parfois mettre en commun ces instances?
  • Le dialogue territorial, ce n’est pas une question d’instances, c’est comment la collectivité prend en compte le travail de ces instances. Il est important de dépasser le cadre des dispositifs même si les dispositifs offrent des occasions de mobilisation.
  • L’auto-saisine du Conseil de développement constitue un élément intéressant pour que les acteurs de ce Conseil se sentent impliqués.
  • La restructuration en réseau des GAL d’une part, des Conseils de développement d'autre part, constitue des opportunités pour progresser et pour faire émerger de nouvelles idées.
  • En tant qu’animateur de territoire, on peut faire bouger les cadres pour faire des instances de dialogue comme le GAL des outils adaptés à notre pratique.

En guise de conclusion

Le dialogue territorial est parfois posé comme un sujet central alors qu’il est un moyen (à moins que le but soit de re-créer du dialogue là où il n’y en a plus). Le dialogue peut être le sujet, le but, dans des cas particuliers (pacification, remobilisation…) ; mais il est le plus souvent un moyen, un objet au service d’un but plus grand: faire avancer le territoire, répondre à des défis….

Filipe Arretz Bidean

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