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Journée d'évaluation des Cités Educatives par l'INJEP / Le retour des experts :

Publié le 11/07/2024
Temps de lecture : 8 min
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L’année 2024 est une année charnière dans la politique de la ville. Elle a vu la signature des nouveaux contrats de ville, qui ont amené une nouvelle géographie prioritaire. C’est également une année charnière pour les thématiques de l’éducation et de la jeunesse, puisque c’est l’année qui voit le début de la généralisation de la démarche des Cités éducatives. On en dénombre aujourd’hui 200 sur le territoire français, sur 323 collèges et 600 écoles. Cela représente des milliers d’acteurs de terrain
L’appel à candidature pour la généralisation du label a rencontré un vif succès, et permettra à des villes volontaires de rejoindre la démarche. 
Cette journée, qui s'est tenue le 17 avril à Paris est une opportunité pour se questionner sur l’évaluation du dispositif, pour mieux identifier ce qui a fonctionné et les pistes d’améliorations. C’est une démarche nécessaire sur chaque cité, pour améliorer l’existant. 
 

Le fil conducteur de cette journée était un rapport, rédigé par l’INJEP à partir des travaux d’évaluation de quinze Cités éducatives réalisées par trois bureaux d’études. 

Ce travail a permis d’observer le travail sur “l’alliance éducative” voulue par les directives nationales, mais aussi sur la diversité des actions menées au sein des Cités éducatives. En effet, chaque Cité est unique, et a besoin de sa propre évaluation en raison des libertés données par le cadre national.  

Evaluation des Cités éducatives : Les retours des experts

L’INJEP coordonne depuis 2021 une évaluation des Cités éducatives, à la demande de l’ANCT. Ils se sont pour cela reposés sur l’aide de 3 équipes de consultants : le cabinet Phare, le cabinet Jeudevi et le cabinet Pluricité. Chacun de ces cabinets s’est vu confier 5 Cités et une thématique à creuser. Les thématiques étaient : 

-La continuité éducative

-Les parcours d’orientation et d’insertion pour les 11-25 ans 

-La place des familles dans les coopération éducatives

Ce processus s’est mené sur plusieurs années, afin notamment d’observer le déploiement des Cités éducatives (la deuxième vague de labellisation s’est faite en 2021) et mettre à disposition des enseignements opérationnels. 

Les approches des cabinets ont été principalement qualitatives,en se basant notamment sur sur l'étude des revues de projet, avec une approche globale du programme. La volonté n’était pas ici de donner un avis sur l’efficacité du programme, mais de donner un avis et d’identifier les conditions de réussite.

Pour mener ce projet, les cabinets ont réalisé un peu moins de 500 entretiens, à la fois auprès d’acteurs institutionnels, de pilotes ou d’enfants et familles. Ils ont étudié 80 revues de projet et ont suivi dans le détail 28 actions.

Sur la question de la mise en œuvre de l’alliance éducative, voilà les points qui ont émergés de l’évaluation : 

  • Sur la composition des instances de gouvernance
    La gouvernance a induit des rapprochements institutionnels efficaces, notamment au niveau de la troïka. Cela a favorisé une collaboration Education Nationale, Etat et collectivités, notamment sur de nouvelles actions nées grâce à ces liens. 
    La gouvernance est souvent élargie au-delà de la Troïka mais certains acteurs sont absents ou trop peu investis (les départements, les régions et les EPCI).  Les parents et les associations sont trop rarement inclus dans les comités de pilotage.
  • Sur la constitution d’approches territoriales :
    Les Cités ont rencontré des difficultés à construire des approches territoriales, mais aussi sur plusieurs questions centrales comme la place des familles, l’insertion et la continuité éducative. Cela s’explique par les orientations nationales plutôt larges, qui permettent au Cités de proposer des actions diversifiées qui répondent au mieux aux besoins de leur territoire, mais qui créent aussi des doutes pour certains territoires. De plus, les institutions qui rejoignent la gouvernance d’une Cité ont des motivations propres antérieures, qu’elles ont tendance à valoriser avant celles de la Cité.
  • Sur le renforcement voire le renouvellement des partenariats :
    Les partenariats mis en place au sein de la Cité renforcent l’interconnaissance. Mais la mobilisation de nouveaux acteurs est un phénomène assez peu fréquent. Certains acteurs présents sont aussi peu mobilisés. Les actions sont également rarement co-construites.
    Il existe enfin des rapports de force, notamment autour des attentes de l’Education Nationale, qui impose une direction via le calendrier scolaire.
     

L’alliance éducative est mise en place partiellement, puisqu’elle n’inclut pas encore tous les acteurs de l’éducation. Elle permet cependant une plus grande participation et collaboration de l’éducation nationale. Mais la Cité a du mal à mobiliser au-delà du cercle institutionnel, et certains acteurs restent en marge. 
C’est par exemple le cas des parents. Il y a une vraie volonté de les impliquer et de les toucher à travers les actions, mais les Cités proposent peu d’actions ciblées vers les familles. De plus, les acteurs ont des visions différentes des parents : l’Education Nationale y voit les parents d’élèves, les collectivités pensent à des habitants et les associations voient des parents comme source de connaissances et compétences sur la parentalité. 
L’alliance éducative a permis aux acteurs de l’Education Nationale de mieux connaître les partenariats territoriaux, qui sont bien différents du fonctionnement hiérarchique de l’institution. Mais il semblerait que le facteur financier soit l’une des principales sources de motivations d’adhésion au programme pour l’Education Nationale.

Un des autres problèmes rencontrés aujourd’hui par les Cités est leur faible connaissance au sein du territoire. Les associations non financées ne connaissent pas son existence, et les parents et jeunes du territoire ne comprennent pas toujours son objectif. Certains acteurs de terrain la voient encore comme une couche de plus dans le mille-feuille territorial. 

Quels ont été les grands enseignements de cette étude ?

Les évolutions de l’offre éducative étaient observées sont plusieurs dimensions : 

  1. Les évolutions qualitatives et quantitatives de l’offre thématique et des actions
  2. Le renouvellement des registres d’action
  3. La cohérence de l’offre proposée
  4. Le public touché

De nombreuses actions ont été développées via le programme, qui a permis de les financer, avec en moyenne 35 actions mises en place par an dans les Cités. Mais les actions peuvent manquer d’ampleur, même si elles sont nombreuses. Les actions sont également souvent ponctuelles. Cette typologie d’actions a-t-elle un effet durable sur les parcours éducatifs ? Il est impossible de répondre à cette question en l’état, puisque cela demande un temps plus long. 
La variété des thématiques traitées au sein d’une Cité peut également affaiblir la cohérence de l’offre, puisque des sujets pourraient être sous-traités alors qu’ils sont centraux sur le territoire.
L’offre est aujourd’hui plus importante, plus étendue en termes de publics et de territoires mais les méthodes d’animation restent plutôt traditionnelles. 
Le public scolaire est bien ciblé par les actions, mais les tranches d’âge 0-3 ans et 16-25 ans sont généralement délaissées.
La dimension expérimentale est peu mobilisée mais les professionnels l’apprécient. Elle est permis par le programme, qui ne demande pas d’objectifs chiffrés sur les actions. Ils peuvent proposer des actions plus ludiques. Il serait intéressant de la valoriser davantage.

Les ressources en ingénierie et l'animation territoriale globale, à travers des appels à projet ou des manifestations d’intérêt pour solliciter plus largement les acteurs associatifs, mais aussi  par un accompagnement des porteurs de projet et rôle des coordinateurs thématiques peuvent améliorer l’offre.

Quels effets sur les publics (jeunes, parents et professionnels) ?

Les effets sur les parcours des jeunes et des parents sont difficiles à mesurer, notamment en raison de la diversité des programmes et des publics, mais aussi des effets souvent constatés à long terme. Il est donc difficile d' avoir un indicateur valable. De plus, sur les actions, on a des indicateurs construits au niveau local, mais sur une seule action à la fois, et qui ne peuvent pas être étendus. 
Chez les professionnels, on constate une meilleure coordination entre les acteurs, mais aussi une plus grande capacité à travailler en transversalité autour d’un projet. 

Y-a-t’il plus d’effet sur l’offre éducative ou les pratiques éducatives des professionnels ?

Les cités ont renforcé l’offre éducative mais sans la “révolutionner”. Par exemple, il y a une prise en compte relativement inégale des thématiques d’emploi-insertion sur les cités, même si la préoccupation est partagée par l’ensemble des Cités. Cela se manifeste par l’absence d’acteurs clés, ce qui affecte la priorité emploi. Certains territoires se disaient qu’ils n’auraient pas de plus-value sur ces questions car déjà des actions sont déjà menées sur le territoire (notamment via les Cités de l’emploi).

Deux philosophies existent dans le déploiement des actions des Cités : Une volonté de boucher “les trous dans la raquette” ou de se focaliser sur un ou plusieurs sujets. Les cités ont plutôt travaillé selon la première, en proposant des actions sur de nombreuses thématiques. Ce fonctionnement a pu compenser des manques de moyens dans le droit commun sur le territoire. 
En parallèle, certains professionnels ont travaillé sur l’accompagnement individuel ou collectif des personnes, sur des formats plus conviviaux et ludiques, avec des actions moins basées sur la parole et plus sur l’action, par exemple avec un (réseau de parents bénévoles interprètes pour aider les parents qui ont une barrière langagière et qui ne comprennent pas toujours les actions de l’école.
Les actions ont  une durée de vie très courte, ce qui ne permet pas toujours d’avoir des effets sur la durée. Le choix des actions devrait répondre à un diagnostic territorial. 
L’approche des Cités éducatives a permis d’apporter plus d'offres d’actions éducatives, mais les façons de faire n’ont pas évolué. Les actions multi-partenariales sont extrêmement rares.

La Cité est aujourd’hui vue comme une strate en plus, qui répond à une partie de ses ambitions, mais pas toute. L’alliance éducative est un idylle qui permet de faire avancer les choses. Elle sert de substitut au droit commun. 
Elles bénéficieront d’une évaluation à plus long terme, pour mieux mesurer les effets qu’elles ont eu. Cependant, le fort turn-over présent dans les équipes fait que la continuité a du mal à exister.

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Jules Baldy, chargé de mission politique de la ville, jules.baldy@pqn-a.fr

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