Web-conférence Revitalisation #13 : « La rénovation énergétique des écoles dans les projets de revitalisation »

Le 15 mai 2024, Pays et Quartiers de Nouvelle-Aquitaine a organisé une web-conférence autour de l’enjeu de la rénovation énergétique des écoles dans les processus de revitalisation des centres-bourgs. 

Cette web-conférence a réuni près de soixante participants (élu.es, technicien.nes et autres) autour des invité.es du jour : 

Siloé HERMILE, Cheffe de projets déploiement EduRénov à la Banque des Territoires

Andrés LITVAK, chef de groupe bâtiment durable au Cerema Sud-Ouest

Jean Marie GARY, maire de Monbahus (47)

Marc- François DIDIER, Chef de projet cohérence et développement du territoire à la Ville de Langon (33) 

Julien PELLETANGE, Chargé de mission « transition écologique et énergétique, risques » au  SGAR Nouvelle-Aquitaine, a conclu cette rencontre. 

Retrouvez le replay de la webconférence ! 

Il y a un besoin massif de rénover le bâti scolaire en France. 

Selon une mission d’information du Sénat de 2023, seul 14% du parc de bâti scolaire en France est aux normes énergétiques. La hausse colossale des coûts de l'énergie pousse les collectivités à réduire leur consommation afin de réduire leurs factures d’énergie. 

Le cadre juridique prescrit une baisse des consommations d’énergie. Au sein de la stratégie nationale Bas Carbone, le décret tertiaire impose aux collectivités de réduire de 40% d'ici à 2030 la consommation d'énergie de leurs bâtiments publics. 

Par-delà son apparence technique, la transition écologique des écoles, collèges et lycées croise des problématiques diverses et différents enjeux : juridiques, économiques, pédagogiques (former à la sobriété énergétique les citoyens et consommateurs de demain), aménagement du territoire, rayonnement et attractivité des collectivités territoriales…

Cette question touche particulièrement les petites et moyennes communes, notamment celles qui ont engagé des processus de revitalisation. En effet, 62 % des écoles françaises se situent sur des communes de moins de 10 000 habitants. Ces écoles sont au cœur de la centralité que représentent ces communes, sont sources de leur attractivité sociale, commerciale, associative. 

La question de la rénovation énergétique des écoles, si elle peut à premier abord sembler très technique, est l’occasion de se questionner sur de nombreuses thématiques : usages, confort, santé, place des enfants et de la nature dans la ville. Elle concerne un grand nombre d’acteurs : élus, enseignants et équipe technique, élèves et parents d’élèves …

Les politiques publiques ont créé un cadre réglementaire de la rénovation énergétique auquel il est nécessaire de répondre. Cependant, rénover un bâtiment, ce n’est pas seulement répondre aux besoins d’économies d’énergies, mais surtout répondre aux besoins des occupants et de leurs usages. L’objectif premier est d’assurer leur sécurité, leur santé et leur confort. 

Il est essentiel de voir à long terme, plus loin que le cadre réglementaire qui est imposé. 

L’impact de la qualité de l’air sur la santé et la performance des occupants des bâtiments tertiaires et notamment scolaires est prouvé. La pandémie de la covid nous a durement rappelé cette importance de la qualité de l’air. 

Si cette qualité de l’air est impalpable, le confort d’été, lui, est un facteur ressenti par les usagers, les épisodes caniculaires étant de plus en plus fréquents. Il est crucial d’être exigeant sur ces facteurs de bonne santé de nos enfants. 

Il est donc essentiel d’aborder cette question de la rénovation énergétique comme une opportunité d’agir pour la santé et le confort des citoyens. 

Il faut objectiver les choix réalisés en prenant en compte le coût global : si la rénovation énergétique est un lourd poste de dépense, sur le long terme, elle représente des économies en énergie, en entretien du bâtiment, et des gains de productivité, de performance cognitive, de confort et de santé 

Les rénovations énergétiques d’ampleur demandent du temps et de forts investissements. Il est possible d’obtenir des résultats avec des investissements moins lourds à porter pour la commune. 

Les occupants, premiers destinataires et usagers, sont un levier pour réaliser des économies d’énergie. Le Cerema organise pour les écoles primaires le ACTEE Cube challenge. Accompagnés pendant un an, les usagers et les agents techniques du bâtiment se défient à baisser le plus possible leur consommation d’énergie, en changeant les réglages des équipements, mais aussi en modifiant leurs habitudes de consommation. 

Par ce challenge, la réduction des consommations d’énergies devient un outil pédagogique.

Vous pouvez contacter Stacy ALOGNA du Cerema par mail pour inscrire votre école communale à cette expérimentation ! 

Témoignage par Jean Marie Gary, maire de Monbahu (47)

Monbahu est une commune de 630 habitants, localisée dans le Lot-et-Garonne. La stratégie de revitalisation du centre bourg est en cours depuis une dizaine d'années, avec une emphase sur le maintien des commerces (agence postale, commerce de proximité et station service communaux). L'intervention d’étudiants de l’ENSAP sur la commune a permis de considérer les actions prioritaires à réaliser. Parmi celles-ci : la rénovation de l’école communale. 

L’école communale accueille 85 élèves venant d’une dizaine de communes voisines, dans quatre classes de la maternelle au CE2. 

Le bâtiment, qui comprend l’école et la cantine, date des années soixante, et malgré sa conception de qualité avec de grands espaces intérieurs et extérieurs, n’a pas été conçu en prenant en compte les questions d’économies d’énergie et d’accessibilité : il n’y avait pas de double vitrage, peu d’isolation, pas de VMC.

Face à l’obsolescence du bâtiment et de son matériel de chauffage, des travaux de rénovation étaient indispensables. 

L’ensemble du bâtiment a été rénové entre 2019 et 2020. Le bâtiment a été isolé par l’extérieur et ses plafonds ont été abaissés. Le chauffage électrique a été modernisé avec une programmation sur les moments de présence et un repartisseur. La VMC et le double vitrage ont été installés, la sécurité et l’accessibilité PMR du bâtiment ont été revues. 

Une centrale photovoltaïque a été installée sur le toit du bâtiment. L'électricité produite est revendue à la SEM Énergie locale. À l’année, la centrale produit environ 500 000 kW, ce qui équivaut à la consommation de 50 habitants. Grâce à cette centrale, le bâtiment est à énergie positive !

La rénovation a été l’occasion d’adapter le bâtiment aux usages réels des élèves et des professeurs : adaptation du préau intérieur aux usages sportifs, création d’une zone périscolaire et d’une aire de jeux.

Préalablement aux travaux, les élus de Monbahu ont organisé une réunion avec l’équipe enseignante, dont l’objectif était de partager un constat sur les besoins de rénovation du bâtiment, mais aussi de comprendre leurs usages quotidiens. 

Pour ces travaux, la commune a été accompagnée par le CAUE 47, qui leur a proposé un diagnostic énergétique du bâtiment, mais aussi par le chargé de mission Territoires à énergie positive de sa communauté de communes. 

Un accompagnement financier a été apporté par la DDT du Lot-et-Garonne et le département à hauteur de 150 000 €, pour un total de travaux de 403 000 €. 

Les travaux ont été réalisés uniquement par des artisans du Lot-et-Garonne, ce qui représente un réel avantage pour la commune, car les interventions de suivi et d’entretien sont plus rapides. Cela a été rendu possible grâce au saucissonnage des lots de marchés publics, qui permet aux artisans locaux spécialisés de répondre. La demande du coût de l’intervention de maintenance comme facteur de notation a permis de prioriser les artisans locaux. 

Grâce à des élus et une équipe enseignante et technique de l’école mobilisée, mais aussi à un architecte et des artisans rigoureux, la rénovation de l’école de Monbahu a été réalisée en six mois seulement. 

Aujourd’hui, la consommation d’énergie de l’école de Monbahu a baissé de 20%. Des réductions supplémentaires sont envisageables grâce à des modifications d’usages.

Témoignage par Marc- François Didier, Chef de projet cohérence et développement du territoire à la Ville de Langon (33) 

La commune de Langon est le pôle de centralité principal du sud-gironde. Elle compte 7300 habitants et 20 000 usagers par jour, qui bénéficient des services situés sur la commune. Cette position de centralité dont dépendent de nombreux habitants des alentours influe sur le projet de ville. 
Les élus se sont engagés dans une démarche forte et volontaire de projet de territoire grâce à différentes conventions : Petite Ville de Demain avec l’Etat, l’AMI Région avec la Région Nouvelle Aquitaine et le Contrat Ville d'Équilibre avec le département de la Gironde. 
Grâce à ce comité de pilotage, la commune bénéficie d’accompagnements financiers et en ingénierie. 
Le projet de territoire se décline sur trois thématiques socles : nature, proximité, culture. 
De ces thématiques découlent la nécessité de la rénovation des bâtiments scolaires : protection de la biodiversité, transition énergétique, création de lien entre les habitants, pédagogie, inclusion des habitants dans la transition écologique, médiation culturelle avec les publics scolaires. 

Grâce à un Schéma Directeur Immobilier et Énergétique, la commune réalise un état des lieux de son patrimoine immobilier. Ce schéma vise à créer une stratégie foncière sur la commune, basée sur les usages des habitants, et à prioriser les rénovations énergétiques à réaliser. 
Les élus ont donc décidé de travailler en priorité sur la réhabilitation de l’école. L’école primaire avait un fort besoin de rénovation énergétique et l’école maternelle pouvait bénéficier d’actions simples et peu coûteuses pour baisser sa consommation d’énergie et améliorer le confort du bâtiment.
Ces réhabilitations ont été intégrées à un Arc de Renaturation Social et Solidaire redéfinissant la centralité et englobant de nombreux équipements. 
 

Pour l’opérationnalisation des rénovations énergétiques des écoles de Langon, il était crucial que le cahier des charges soit une traduction de la commande politique et des trois enjeux: nature, culture et proximité. 
Suite à une maîtrise d’usage, dans l’école maternelle, un travail va être réalisé sur le confort d’été du bâtiment, la biodiversité et l’inclusivité de la cour d’école. Ces modifications simples demandent peu d’investissements, mais plutôt des changements de comportements. En plantant des arbres dans la cour de récréation, on désimperméabilise, on modifie les usages de la cour par les enfants, on questionne leur relation à leur environnement. 

L’école primaire va bénéficier d’une réhabilitation globale prenant en compte les enjeux de santé des usagers.

Dans l’école maternelle, grâce à une maîtrise d’usages, des ateliers ont été réalisés avec l’équipe pédagogique pendant la phase de diagnostic pour aider à la programmation. 
Les enfants seront associés pendant la phase de maîtrise d'œuvre. 
Pour l’école primaire, les enfants et le périscolaire réaliseront des ateliers où ils dessineront ensemble l’école. Puis, tous les partenaires du projets travailleront lors d’ateliers sur des thématiques diverses, qui se croisent dans la programmation de la rénovation de l’école : alimentation, déchets, architecture, biodiversité. 

Face au coût de la rénovation énergétique des bâtiments scolaires, il est nécessaire de se poser la question de la rentabilité. Pour la maximiser, il semble essentiel de réfléchir à d’autres usages de ces bâtiments, sur des horaires ou des périodes ou ils ne sont pas utilisés. 
Il est également crucial de penser l'adaptation des bâtiments aux évolutions démographiques : comment ajouter ou supprimer facilement une classe ? Comment réemployer le bâtiment à des usages complètement nouveaux si l’école vient à fermer par manque d’usagers ? 
 

• Ne pas avoir peur d’une rénovation globale, un bâtiment visible et utilisé par toute la population 
• Ne pas rien faire et oser se lancer, même en commençant par de petits investissements 
• S’inspirer des expériences d’autres territoires 
• Bien s’entourer en expertise et en financement 
• Utiliser la question de la rénovation énergétique pour aborder d’autres sujets : usages, confort, santé 
• S’assurer du soutien et de la participation des acteurs et des usagers du bâtiment 
   

EduRénov est un programme de la Banque des Territoire, en partenariat avec l’Etat, l’Ademe, le Cerema et CEE Actee qui vise à accompagner 10 000 projets de rénovation de bâtiments scolaires d’ici à 2027. Cette accompagnement est protéiforme : inspiration via la mise en valeur d’expériences, animation d’un réseau de partage de pratiques, apport d’ingénierie, accompagnement financier. Le programme vise tous les projets, à tout niveau de maturité. L’objectif suit celui du décret tertiaire de baisse de 40% des dépenses d’énergie.

Une plateforme qui concentre toutes les informations et les outils nécessaires au bon déroulement d’une rénovation énergétique d’école est en cours de création.

Depuis un an, 1575 projets ont rejoint le programme. 
 

• Fonds Vert : finance les opérations de rénovation énergétique 
• Dotation de soutien à l’investissement local : subventiond’investissement, taux d’aide variable selon le type de projet (entre 20 et 80 % du coût du projet), appel à demande de subvention  annuel auprès des préfectures 
• Fond chaleur ADEME : projets de production de chaleur à partir d’énergies renouvelables et de récupération
• Le Cerema accompagne les collectivités territoriales dans le domaine du bâtiment sous forme d’assistance à maîtrise d’ouvrage 
• Programme CEE ACTEE action des collectivités territoriales pour l’efficacité énergétique centre de ressource et aides financières 
• Dotation d'équipement des territoires ruraux (DETR)
   

>> un article récent publié dans THE CONVERSATION sur l'impact de la QAI sur les apprentissages
"Pollution de l’air en classe : quel impact sur les apprentissages des élèves ?" :
 

>> Guides collection "Les Essentiels" du Cerema :

> "Réduire l’impact carbone des bâtiments" :
https://www.cerema.fr/fr/centre-ressources/boutique/reduire-impact-carbone-batiments

>  "Investir son énergie dans la qualité de l'air intérieur" :
https://www.cerema.fr/fr/centre-ressources/boutique/investir-son-energie-qualite-air-interieur

> "Bâtiments publics - Réaliser des économies d'énergie"
https://doc.cerema.fr/Default/doc/SYRACUSE/592315/batiments-publics-realiser-des-economies-d-energie

> "Bâtiments publics, prévenir les coups de chaleur"
https://doc.cerema.fr/Default/doc/SYRACUSE/595611/batiments-publics-prevenir-les-coups-de-chaleur