Retour sur l’étude « Aux lisières du diplôme », persévérance et décrochage scolaire à Mérignac et Sainte-Foy-la-Grande

Si le phénomène du décrochage scolaire n’est pas nouveau, il est progressivement devenu un problème, en particulier en raison de ses effets sur l’insertion dans le monde professionnel et sur les trajectoires de vie. Joël Zaffran explique ainsi que le décrochage scolaire est un phénomène structurel dont l’importance peut varier en fonction de la conjoncture économique¹. En tout état de cause, le coût (économique, social,…) du décrochage encourage les pouvoirs publics à agir. En effet, alors que de nombreuses politiques publiques volontaristes visent à prévenir le décrochage scolaire, et plus de dix ans après le plan gouvernemental français « Tous mobilisés pour vaincre le décrochage scolaire », 7,8 % des jeunes quittent encore leur formation avant l’obtention d’un diplôme de niveau 3  (CAP-BEP)². 

Egalement touchées par ces phénomènes, malgré des caractéristiques territoriales différentes, les villes de Mérignac et Sainte Foy la Grande ont souhaité engager une démarche pour mieux comprendre le décrochage scolaire sur leurs communes. Les chercheurs ont mené leur enquête à Mérignac au sein de quartiers différents (concernés par la politique de la ville ou non) et à Sainte Foy la Grande à partir de septembre 2023 et durant 17 mois. Une méthodologie qualitative a été retenue, reposant sur des observations et des entretiens réalisés avec 19 professionnels et 68 jeunes. 
 

Alors que le décrochage scolaire est souvent perçu comme une question liée à un rejet de l’école, les chercheurs ont mis en évidence le fait qu’il se construit comme un processus et qu’il existe une pluralité de facteurs du décrochage. Ils sont à la fois psychosociaux, hérités (le contexte social dans lequel le jeune grandit) et scolaires. 

En fonction des territoires et du genre des enquêtés, des spécificités sont ressorties. L’enquête révèle des différences notables quant à la manière dont les jeunes se perçoivent et appréhendent leur avenir, en fonction de leurs territoires de vie. Par ailleurs, de nombreuses jeunes femmes interrogées ont également témoigné de violences sexistes et sexuelles, ayant eu des conséquences sur leur décrochage. La santé mentale, les violences contre soi et le besoin d’écoute ressortent enfin comme des éléments transversaux de l’enquête. Les sociologues ont imaginé une typologie de décrochage scolaire en fonction du rapport (positif ou négatif) à l’école d’une part et au travail d’autre part, permettant de mieux comprendre les processus qui ont pu mener les jeunes à quitter leur formation. 

A partir de ces résultats, l’équipe de chercheurs a formulé un ensemble de préconisations pour agir de manière plus efficace et permettre aux jeunes de construire une trajectoire choisie. Elle insiste notamment sur l’importance du rapport à la temporalité, qui varie selon le « moment de vie » du jeune. En effet, si le temps long est nécessaire pour permettre aux jeunes de cheminer, la réactivité des dispositifs est également importante lorsque les jeunes sont prêts à se saisir d’une opportunité. Les chercheurs encouragent également le développement d’actions de prévention. Pour accompagner le raccrochage, notamment scolaire, la démarche d' « aller vers » est privilégiée. Enfin, compte tenu des spécificités de chaque parcours, la construction de réponses à la fois adaptées et concertées entre les différents acteurs est nécessaire.

L'étude complète sera prochainement publiée et diffusée en ligne. Les informations seront mises à jour sur cette page.

1. Zaffran, J. (2024). Décrochage scolaire : des constats aux dispositifs. Informations sociales, 212(2), 80-89. https://doi.org/10.3917/inso.212.0080.  

2. Données INSEE