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Les quartiers Politique de la ville de la Nouvelle-Aquitaine à l’aune de la crise

Laurine Brun
Publié le 29/04/2020
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En Nouvelle-Aquitaine comme ailleurs, les difficultés que connaissent les quartiers prioritaires “en temps normal” se sont aggravées avec la crise. Dans notre article du 3 avril dernier, nous vous faisions part de l’impact de cette crise sur les habitants qui vivent dans ces quartiers. Depuis, c’est toute une nouvelle manière de “faire” et de travailler qui s’est mise en place sur les territoires. Les équipes locales doivent s’organiser désormais pour faire face aux urgences sociales, sanitaires et économiques, tout en réfléchissant déjà à “l’après”. 

Les experts, les réseaux d’élus et de professionnels expriment largement leurs points de vue sur les impacts de la crise, sur les inégalités structurelles auxquelles sont confrontés ces quartiers et sur le fonctionnement actuel de la politique de la ville.

Le constat est unanime : la priorité est de répondre aux urgences sanitaires, sociales et économiques. Il s’agit de faire en sorte de garantir le “minimum vital”, en termes d’aide alimentaire, d’accès à la santé, de continuité éducative, de soutien financier aux plus pauvres ou encore de soutien aux associations et aux entreprises.

La mise en oeuvre de ces actions repose principalement sur un binôme “Etat – Commune”, et sur la forte mobilisation des associations et des opérateurs locaux. A court terme, l’enjeu est de disposer de messages clairs et coordonnés de l’ensemble des autorités publiques pour pouvoir “faire face” de manière cohérente. Ensuite, il s’agira de mesurer les impacts de la crise et d’en tirer les enseignements. Les futures programmations Politique de la ville devront sans aucun doute prendre en compte ces nouvelles réalités.

Dans ce contexte, et après plus d’un mois de crise sanitaire, comment les équipes locales de notre région appréhendent-elles cette situation? Quelles initiatives ont émergé sur les territoires ? Que met en lumière cette crise en termes de nouveaux enjeux et priorités pour la Politique de la ville ? Quelles inquiétudes sont d’ores et déjà présentes pour “l’après” ? 

L’équipe de PQN-A a réalisé une dizaine d’entretiens téléphoniques durant cette période avec certains territoires Politique de la ville de la région. Les différents retours d’expériences nous permettent d’appréhender la crise au niveau local. Nous vous proposons ci-après un premier tour d’horizon des situations au cœur de nos quartiers.

A l’épreuve de l’urgence et de la crise, de nouvelles modalités de coordination des professionnels Politique de la ville

Une nouvelle gestion d’équipe : se coordonner à distance

Le premier bouleversement ressenti par les référents politique de la ville est celui du mode d’organisation. Faire réseau, animer des dispositifs, coordonner des équipes et être sur le terrain n’est désormais plus possible. De nouveaux “modes de faire” sont alors apparus.

Pour ne donner que quelques exemples, certains ont créé des groupes Whatsapp pour communiquer entre membres d’équipes.  D’autres se sont répartis les tâches : “Chacun fait un peu sa part : la ville est en lien avec les associations via les agents de développement qui font de la veille, l’agglo gère la newsletter et la déléguée du préfet gère les réunions thématiques” (Limoges Métropole). 

L’essence même de la Politique de la ville, c’est-à-dire son réseau, y trouve toute sa valeur ajoutée dans cette période de confinement : “Quand on doit travailler en urgence, la plus-value de la Politique de la ville se fait voir tout de suite : c’est d’aller très vite pour regrouper le réseau” (Bordeaux). 

Ce sont surtout les villes qui sont chefs de file de cette gestion de crise : les intercommunalités sont présentes en renfort. Les Centres Communaux d’Action Sociale (CCAS) sont également souvent en première ligne. Les missions locales, les associations, les médiateurs et les agents de police font par ailleurs le lien. 

Une Politique de la ville à l’arrêt : gérer l’instant présent avant tout !

Le constat est quasiment unanime : la Politique de la ville est à l’arrêt. Les axes et actions prioritaires fixés dans le cadre du contrat de ville sont en suspens. L’urgence nécessite désormais que les collectivités s’occupent des points de vigilance et des remontées du terrain. 

3 domaines d’actions (non exhaustifs) sont surtout mis en exergue : 

  • Soutenir les entreprises, l’événementiel et le secteur associatif 

Le confinement est arrivé en plein dans l’instruction des dossiers des associations. On a essayé de continuer mais c’est difficile. On est dans le flou parce qu’on ne sait pas combien de temps ça va durer. Tout l’événementiel est tombé à l’eau. Autant certaines associations ont une vision à court terme des conséquences négatives (événementiel, consommation, prestation, secteur culturel/sportif). Pour d’autres (acteurs multi sujets) c’est plus compliqué” (Bordeaux)

  • Agir pour la continuité éducative

Certains élèves sont déjà hors radar par l’Education Nationale” (Grand Angoulême) 

On a créé un groupe whatsapp de parole avec les mamans du groupe parentalité. Avec les écoles, on a mis en place un système de photocopie à l’école remis par les adultes relais dans les boîtes aux lettres”. (Mont de Marsan) 

  • Faciliter l’accès à internet 

On réalise les difficultés d’accès à internet. C’est surtout des difficultés d’accès aux outils : ils ont des smartphones mais pas d’imprimante ou d’ordinateurs par exemple” (Grand Périgueux)

On a maintenu des groupes de travail informels dématérialisés avec des tutorats : apprendre à concevoir un blog, comment faire une web TV, comment avoir une vie sociale via le numérique, etc”  (Mont de Marsan)

A l’horizon du “jour d’après” : entre inquiétudes et nouvelles pistes d’action

Déconfinement et points de vigilance

Plusieurs inquiétudes sont relevées. Pour ne donner que quelques exemples, la perspective de la période estivale et la stigmatisation des quartiers sont deux des sujets qui interrogent pour le futur proche qui nous attend. 

  • La gestion de la période estivale 

L’été qui arrive est une période qui questionne, notamment en termes de surpopulation et d’offre d’activités pour les habitants des quartiers. “C’est pendant l’été que ça va se gérer, que ça va inquiéter. Des choses vont se solutionner de fait, comme par exemple les problématiques de regroupement en pied d’immeuble puisqu’ils ne seront sûrement plus interdits. Par contre, des sujets vont redevenir prioritaires” (Bordeaux)

  • Les quartiers sous tension

Le constat est visible depuis le début du confinement : les quartiers sont sous tension. Plusieurs exemples, notamment à l’Ousse des Bois (Pau) ou aux Aubiers (Bordeaux),  prouvent que le poids du confinement pèse sur les quartiers. L’espace public étant souvent privilégié et l’exiguïté des habitations étant un fait, le respect des règles est extrêmement difficile. Aussi, le confinement a mis l’économie parallèle à rude épreuve : “beaucoup vivent du deal, donc aujourd’hui leur activité est démolie” (Mont de marsan). 

Malgré tout, une crise qui permet de remettre certains sujets en haut de la pile

  • La santé comme nouvel enjeu prioritaire : “La crise va nous permettre de nous engager sur une démarche santé. On expérimente avec la crise du Covid. On agit donc il serait intéressant qu’on agisse en mettant en oeuvre un Contrat Local de Sante (CLS) ou Contrat Local (CL) de santé mentale. La crise a permis de mettre en exergue cet enjeu. Cette priorité n’était pas forcément communautaire. Maintenant elle fait sens pour la totalité des habitants, cette politique va créer des consensus” (Royan)
  • Les emplois de proximité seraient une des opportunités pour réduire le chômage dans les quartiers. Par exemple, les emplois saisonniers agricoles ont un besoin de main d’oeuvre accru. Lorsque les territoires s’y prêtent, les habitants des quartiers peuvent y trouver une porte d’entrée vers l’emploi. “On pourrait organiser des calendriers de saisonniers : ça peut donner des boulots temps plein et accessibles aux personnes des quartiers” (Mont de marsan). Le secteur de l’emploi-insertion sera sans aucun doute une des prochaines priorités mises en avant à l’horizon du déconfinement. (pour en savoir plus, lire notre article sur ce sujet)
  • L’outil numérique comme nouvelle pratique : “Je trouve que ça nous amène à se rendre compte que l’outil numérique, qui est tant décrié d’habitude, peut être aussi un outil qui nous permet de faire des choses. Ca permet de requestionner nos manières de faire, comment innover et changer” (Grand Périgueux)

En temps de crise, les territoires s’engagent !

Les 26 agglomérations “contrats de ville” s’organisent pour gérer au mieux cette période de crises. Retrouvez notre page territoire qui liste les différents liens utiles et toutes les informations nécessaires sur chaque territoire. 

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