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Fiertés rurales : sortir du placard, faire territoire

Publié le 10/06/2025
Temps de lecture : 4 min
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“Queers du terroir, on sort du placard !” “Queer du cru, on prend la rue !” “Pédale rurale, c’est fini la cavale !”


En 2025, les slogans colorés et engagés des Marches des Fiertés rurales résonnent dans les territoires néo-aquitains. Derrière l’humour et la fierté, une revendication profonde : vivre pleinement son identité partout, y compris en milieu rural.

Pourquoi cet article ?

A l’occasion du Mois des Fiertés, nous souhaitions investir le sujet de la lutte contre les discriminations LGBTQIphobes dans les ruralités. En effet, lutter contre les discriminations, c’est renforcer la cohésion sociale. C’est permettre à chacun de vivre dignement, d’accéder aux droits, de se sentir légitime dans son territoire.
C’est aussi reconnaître que les ruralités sont plurielles et que leurs habitants ont le droit à la diversité, à la fête, à l’expression de soi, sans avoir à fuir vers la ville.

PQN-A et la lutte contre les discriminations

Depuis 2023, PQN-A réinvestit le sujet de la lutte contre les discriminations, principalement dans le cadre de l’animation sur la Cohésion et la Politique de la Ville.

Nous avons produit de nombreuses ressources pour accompagner les acteurs néoaquitains sur la compréhension des enjeux et des moyens d’agir pour lutter contre les discriminations : 

Lexique :

LGBTQI+ : acronyme qui réunit les personnes qui sortent des normes d’orientation sexuelle et de genre : Lesbienne, Gay, Bi, Trans, Queer, Intersexe. En fin d'acronyme, le symbole + inclut toutes les personnes qui ne se retrouvent pas dans les termes précédemment cités, mais dont l’orientation sexuelle ou l’identité de genre sortent des normes. 
 

Mois des fiertés : Le Mois des Fiertés LGBTQI+ est une célébration internationale qui a lieu en juin de chaque année afin de rappeler le combat pour les droits LGBTQI+. Pendant ce mois ont lieu des marches des fiertés, ainsi que des événements autour des personnes LGBTQI+. 
 

Queer :
- en dehors des catégories, qui conteste le principe même de catégorisation 
- mot parapluie, qui inclut toutes les personnes qui sortent des normes de sexualité et de genre, sans les définir.

 

Coming-out : révélation volontaire de son orientation sexuelle ou de son identité de genre

 

Être dans le placard : ne pas avoir fait son coming-out, ne pas avoir identifié et fait connaître son orientation sexuelle ou son identité de genre

Un état des lieux national alarmant :

D'après les chiffres du ministère de l'intérieur, en 2024, la France fait face à une augmentation de 4% des infractions anti-LGBTQI+ signalées. 

En prenant un peu de recul, on observe une dégradation de la situation pour les personnes LGBTQI+ en France. La RainbowMap, un outil de l'European Region of the International Lesbian and Gay Association (ILGA-Europe) qui propose un état des lieux annuel des situations juridiques et politiques des personnes LGBTQI+ en classant les 49 pays européens sur une échelle allant de 0 % (violations flagrantes des droits humains, discrimination) à 100 % (respect des droits humains, pleine égalité). Entre 2019 et 2025, la France est passée du 5ème rang du classement au 15ème rang

Plus de la moitié (55%) des infractions anti-LGBT interviennent dans les grandes agglomérations et notamment en région parisienne. Elles sont principalement relevées dans l'espace public (27%) ou en milieu résidentiel (22%). D'après le ministère, l'analyse de la répartition territoriale doit être effectuée avec précaution : "elle peut refléter des différences de propension à porter plainte selon le type d’unité urbaine". Cette première analyse de la question des discriminations LGBTQI+ selon la géographie nous pousse à nous questionner : quel état des lieux dans nos ruralités ? Quelles initiatives pour lutter contre les discriminations ? 

Différencier : discrimination, injure, propos haineux…

En droit, une discrimination est un traitement défavorable qui doit généralement remplir deux conditions cumulatives : être fondé sur un critère défini par la loi (sexe, âge, handicap…) et relever d'une situation visée par la loi (accès à un emploi, un service, un logement…).
À ce jour, la loi reconnait plus de 25 critères de discrimination, dont l’orientation sexuelle et l’identité de genre. 

Les injures ou encore les violences ou propos haineux ne sont pas des discriminations, mais sont interdits par la loi et sanctionnés.
 

Une thématique trop souvent vue comme urbaine

Dans l’imaginaire collectif, la lutte contre les discriminations peut souvent être vue comme un “un sujet d’urbains”, de grande ville. 

Historiquement, les minorités sexuelles et de genre se sont rendues visibles, ont acquis des droits. Dans les sciences sociales, les identités sexuelles et de genre variant de la norme et les discriminations qui leur sont liées ont été étudiées.  Cependant, cette histoire et cette visibilité se sont principalement construites dans des contextes urbains, cachant une autre histoire, d’autres groupes sociaux, d’autres espaces, avec des histoires et des vécus différents. 

Les ruralités ne sont ni vides de diversités, ni exemptes de violences. Elles sont marquées par des réalités spécifiques : isolement, invisibilité, manque de lieux sûrs et de représentation.

Les LGBTQI+ phobies en ruralité, quel constat ?

Un constat national de renforcement des discriminations LGBTQI+phobes

Selon le Rapport sur les LBGTQIphobies 2025 de SOS Homophobie, “le climat ambiant n’a cessé de se dégrader au cours de l’année 2024”. 
Ce climat touche tous les territoires : “Dans les contextes suivis par l’association, dans tous les espaces de vie et sur l’ensemble du territoire, les personnes LGBTQI sont touchées par diverses manifestations des LGBTQIphobies”.

Des enjeux spécifiques aux ruralités

Les territoires ruraux peuvent, dans l'imaginaire collectif, apparaître comme moins accueillants pour les personnes LGBTQI+. Loin de l’anonymat de la grande ville, le regard sur l’autre et le contrôle social peuvent y être plus forts et peuvent inciter à rester “dans le placard”. Les personnes LGBTQI+ y ont peu d’accès à des lieux festifs, associatifs, de communauté pour se retrouver et partager. 

"Grandir ou vivre en milieu rural représente un défi particulier pour les personnes queer, marqué par un manque cruel d'infrastructures, de visibilité, mais aussi de modèles et de représentations."

Mathieu Vidard Animateur de la France au Carré, dans l’émission “Queer dans les campagnes” du 25.05.2025, France Inter

 

Les travaux du sociologue Colin Giraud, auteur de L’arc-en-ciel au-delà des villes (2024), montrent qu’il existe une différence marquée entre les vécus des LGBTQI+ de milieux ruraux et ceux de milieux urbains, “surtout quand on est un enfant du pays”. Le contrôle social, la proximité, l’absence d’anonymat peuvent inciter à taire son identité.

"Fuir la campagne est une réalité pour beaucoup, et se construire ailleurs, dans une grande ville, tient parfois de la survie. Toutefois, la campagne n’est pas un désert LGBTQIA+."

Colin Giraud Sociologue

Les discriminations LGBTQIphobes touchent tous les territoires, mais prennent en ruralité des formes spécifiques :

  • Manque de lieux communautaires ou festifs
  • Mobilité réduite : un frein à l'accès aux espaces sûrs
  • Soins inadaptés ou indisponibles, notamment pour les personnes trans
  • Isolement renforcé par l’absence de pairs et de représentation 

Ces difficultés spécifiques renforcent la nécessité d’agir à cette échelle, pour faire de l’égalité un droit réel partout.

Comment agir contre les LGBTQI+phobies en ruralité ?

Raconter les vécus de personnes LGBTQI+ en ruralité

Partager les vécus de personnes LGBTQI+ vivant en ruralité, c’est prouver qu’ils existent et qu’ils peuvent être des vécus divers, heureux. Quelques productions : 

Se retrouver lors de marches des fiertés

L’organisation de marche des fiertés en milieu rural poursuit plusieurs des objectifs visés dans le Plan national d‘actions pour l’égalité, contre la haine et les discriminations anti-LGBTQI+ 2023- 2026 :

  • Sensibiliser à la haine et aux discriminations anti-LGBTQI+ en milieu rural
  • Promouvoir la visibilité des personnes LGBTQI+ en milieu rural
  • Créer un espace de rencontre, de communauté, de solidarité  pour les personnes LGBTQI+ en milieu rural
  • Rendre le milieu rural plus attractif pour les personnes LGBTQI+

Des marches des fiertés sont organisées en mai et juin en Nouvelle-Aquitaine et dans toute la France dans de nombreuses communes rurales (Guéret, Excideuil, Chenevelles …) 

"Je veux casser cette légende urbaine que les gens de la campagne sont forcément des homophobes."

Cyril Cibert maire de Chenevelles (86)

Créer des lieux sécurisés en ruralité

En ruralité, des lieux de communautés permettent aux personnes LGBTQI+ de se retrouver, de partager des vécus, des conseils, du soutien, de partager des moments sans se questionner sur le risque d’être discriminées. Leur présence signale également l’inclusivité et le soutien de la collectivité, quand les locaux sont prêtés par la commune par exemple. 

  • A Melle, dans les Deux-Sèvres, Bouillonnant·e·s 79, l’association melloise féministe et queer, organise un festival, et a pour projet  la création d’un café culturel
  • Dans le Cantal, un lieu d’accueil rural permet aux jeunes LGBT+ de venir « se ressourcer », un article du Monde à consulter ici. 
     

Enquêter, quantifier les discriminations, qualifier les situations :

Pour mieux comprendre et agir contre les discriminations LGBTQIphobes dans toutes les zones géographiques, il est essentiel de qualifier les situations spécifiques des personnes concernées en milieu rural. 

  • Avec Rura, l’association dédiée à la jeunesse des territoires ruraux et des petites villes, les chercheurs Arnaud Alessandrin et Clément Reversé mènent une enquête sur les jeunes ruraux LGBTQIA+ dans le but de mieux connaître leurs enjeux et leurs besoins.  Répondez à l’enquête ici
  • Les Bascos, association LGBT+ du Pays Basque, Arcolan (antenne en Béarn) et Nos Couleurs (antenne dans les Landes), mènent chaque année une enquête sur les discriminations en raison de l'orientation affective ou de l'identité de genre sur leurs trois territoires. Répondez à l’enquête ici.

Sources et ressources :

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